Trop calme et trop vide, un peu de monde ?

Invité

Elle répondit à son baiser, et ce ne fut pas pour me déplaire. Après un échange passionné, il me sembla qu'elle me remercia. Un "merci" à peine audible pour moi, tellement j'étais déconnecté de mes sens. Tout dans ma tête était sens dessus dessous. Mes oreilles n'entendaient que sa peau, ses lèvres, mes mains ne sentaient que la résonance des battements de son coeur, mes yeux ne voyaient qu'elle. J'hésitais à déplacer mes mains autre part que sur ses hanches ou dans son dos; après tout, elle pourrait très mal le prendre...

Lorsque nos lèvres se détachèrent à nouveau, je l'embrassais au coin des lèvres, sur la joue, près de l'oreille. Je reculais un peu mon visage de sorte à pouvoir voir tout son visage, puis, avec un sourire, lançais:

"Et si nous continuions le programme? Il me semble qu'il était prévu que je te fasse visiter l'établissement, non...?"

Je descendis du rebord de la fenêtre, et, la tenant par les hanches, l'aidais à descendre - bien que cela ne soit pas bien haut. Le lui volais un court baiser, puis passais mon bras autour de ses épaules, commençant la marche.

"Bon, lançais-je gaiement. Par quoi commence-t-on? Y a-t-il quelque chose en particulier que tu aimerais voir en premier?"

Cela me rappela que cela ne faisait même pas une heure que nous nous connaissions. Etrange réalité. Moi qui, auparavant, m'assurais toujours de bien connaître la fille et mes sentiments pour elle avant de me lancer, j'étais dans la situation totalement inversée. Mais pour l'instant, peu m'importait; si avant, je ne voulais pas me tromper pour éviter d'avoir mauvaises surprises et blessures, en l'instant, je ne redoutais rien. Comme si le fait d'avoir changé d'environnement m'avait rendu plus fort moralement, et me permettait de ne pas craindre une éventuelle blessure de coeur. Et puis, mon instinct me disait que ce ne serait probablement pas Emi qui me blesserait.

Invité

Le programme… L’établissement… Visiter.

Même lorsqu’il l’aida à descendre, elle avait le regard un peu perdu, comme si elle avait oublié quelque chose. Vous savez, comme lorsque l’on rêve. Mais d’un rêve qui vous semble important. A votre réveil, vous vous dites : « tiens…? » et ça vous tracasse jusqu’à un certain moment. Dans le cas d’Emi, c’était pareil, sauf qu’elle n’avait pas rêvé.

Lorsqu’il l’embrassa légèrement, une fois au sol ( ou presque ), ça y était, elle avait l’impression d’être revenue dans son rêve, et là, elle s’était demandé sérieusement de quoi il avait voulu parler. Pire encore, quand il passa ses bras sur ses épaules, là, elle avait complètement oublié ce qu’il avait dit.

« Y’a-t-il quelque chose en particulier que tu voudrais voir en premier ? »
A cette question, il n’y eu pas de réponse immédiate.

- Euh… soupirait-elle. Ah ! Ah oui ! Désolée, ça m’était complètement sortit de la tête ! Avoua-t-elle, ayant fait le lien « programme, établissement, visite »

« Ai-je sérieusement perdu toute trace d’intelligence, ou bien ? » pensait-elle.

- Oui, reprit-elle en prenant Yaël par la taille. Je voudrais voir une salle de musique où il y ai un grand piano.

Même si elle avait emmené ses toiles, la peinture restait une activité parmi tant d’autres. Une salle vide, bien résonnante, munie d’un piano était l’idéal de cette demoiselle pour chanter en même temps que jouer. Elle aurait bien voulu savoir où étaient les classes ainsi que sa chambre, mais pour l’instant…

Lorsqu’Emi leva la tête vers Yaël, elle ne pu s’empêcher de sourire, même un bref instant. Même si ce n’était pas le premier petit-ami qu’elle ait eut, c’était sans doute le premier qui lui semblait aussi charmant et attentionné. Enfin elle espérait que ça allait durer ainsi.

- Enfin non. Laisse. Tu m’emmènes où tu veux, déclara-t-elle en regardant loin devant elle, tout en esquissant un sourire.

Invité

J'étais en train de me demander où pouvait-il y avoir un grand piano. En suivant la logique, piano=instrument, et où trouvait-on des instruments au lycée: en salle de musique. Et donc, je me demandais si j'avais vu la salle de musique, et si oui, où. Mais je fus interrompu dans ma longue et profonde réflexion par une phrase d'Emi.

"Enfin non. Laisse. Tu m’emmènes où tu veux, avait-elle déclaré."

Je m'arrêtais net et la regardais, stupéfait, pendant quelques instants.

"Tu devrais pas répondre ce genre de chose à un garçon, Emi, lui dis-je en esquissant un sourire. C'est un coup à te retrouver dans la chambre!"

Je ris légèrement, puis relançant la marche et la serrant un peu plus contre moi, continuais plus sérieusement:

"Bon, faut que je me rappelle où est la salle de musique... Après on avisera, piano ou non. Tu joues du piano? demandais-je soudain, comme si je venais de comprendre."

Je parcourrais en sa compagnie bon nombre de couloirs. Nous croisions quelques élèves de-ci de-là, sans trop faire attention à ceux-ci. Nous étions dans notre petite bulle. La salle de musique ne me semblait qu'un vague but au loin. En chemin, j'en profitais pour faire un peu connaissance. Il était un peu ironique de faire connaissance après commencer à sortir ensemble. N'était-ce pas l'inverse, de coutume? Mais peu m'importait.

"Sinon, toi, avec tes parents, ça se passe bien...? questionnais-je sans trop savoir par où commencer."

Invité

Avait-elle dit quelque chose de bizarre, pour que Yaël s’arrête, comme ça, en la dévisageant.

- « Un coup à me retrouver dans la chambre ? » répéta-t-elle. Oh. Tu penses comme ça ? Pfff… Le taquinait-elle en souriant. Mais… Merci.

Se décidant à reprendre la marche, elle aussi le serra un peu plus, comme si elle avait peur de se réveiller, et que son rêve prenne fin. Il lui posa par la suite question à laquelle elle répondit.

- Ah oui, je joue du piano… C’était mon moyen pour « passer le temps », mais au final, j’ai continué… dit-elle en regardant ses mains.

Il l’entrainait parmi les couloirs qui s’étaient enfin décidés à accueillir quelques élèves, et le soleil imposait déjà ses rayons plus ou moins forts sur la peau de chacun. Emi soupirait. Elle n’aimait pas l’été, et préférait l’hiver. Elle aurait voulu naître en hiver, mais malheureusement ce n’en fut pas le cas. Il y avait bien une question qu’elle n’aurait pas voulu entendre dans la bouche de Yaël, et c’en était une qui concernait ses parents. Et là, il posa exactement la question qu’il ne fallait pas. Au du moins, la question à laquelle elle ne voulait pas répondre. Elle se tut un moment, sans mot dire, se contentant de regarder au loin, les filles qui commençaient à réviser pour un quelconque examen.

- On ne peut pas dire qu’il se passe grand-chose avec eux…

Elle s’arrêta de parler en continuant d’avancer sous le bras de Yaël. Elle ne savait pas trop si elle devait lui parler de sa famille et de ses problèmes, mais comme lui, il l’avait fait… Enfin non. Il n’avait pas parlé de ses problèmes, mais avait expliqué en quelques mots sa situation familiale. Alors elle fit pareil :

- J’ai été rejetée par mes parents, élevée par ma grande sœur qui n’avait à l’époque seulement dix ans. Je me suis écartée de ma famille au maximum et de la fille qu’ils ont eu après moi. Ça fait des années que je ne les ais pas revus, et honnêtement, je m’en porte on ne peut mieux…! Voila… Voila comment ça se passe avec mes « parents ».

Il restait beaucoup de choses qu’elle n’avait pas dites. Des choses plus graves qu’elle ne voulait pas le voir écouter. D’où venaient les cicatrices qu’elle avait sur le dos et sur les bras ? Le problème qui venait de sœur en sœur, et trop de choses.

- Mais ça va, je fais avec…

A présent, ils étaient arrivés devant une salle où se balançait une pancarte aux écritures neuves signifiant « salle de musique n°1 ». Elle se tourna vers Yaël, puis se mit face à lui en lui tenant les deux mains.

- Et toi, demandait-elle, tu as des frères ou des sœurs ? Parce que moi, je te donnes volontiers ma petite sœur. Elle me tape sur les nerfs, mentit-elle.

Enfin, elle mentait mais pour une raison qui lui semblait bonne, et elle ne voulait certainement pas afficher son problème envers sa sœur comme cela.

Invité

Aïe. Visiblement, j'avais posé la question de trop. En quelques phrases, elle m'expliqua rapidement qu'elle était en froid avec ses parents. Je gardais le silence, ne sachant trop que dire; après tout, même si je ne m'entendais pas avec mon père, nous restions tout de même en contact. Un contact un peu électrique, certes, mais contact quand même. D'un certain point de vue, je me dis que c'était peut-être mieux que rien du tout.

"Et toi, tu as des frères ou des sœurs ? me demanda-t-elle alors. Parce que moi, je te donnes volontiers ma petite sœur. Elle me tape sur les nerfs."

J'eus un faible sourire.

"Ha ha, les aînés se plaignent toujours de leurs benjamins, plaisantais-je doucement. Mais au final, ils sont bien content de les avoir."

Elle ne savait pas. Elle ne pouvait pas savoir. De nouveau un voile de nostalgie emplit mon regard, mais je fis mon possible pour qu'Emi ne le remarque pas.

"Eh bien, moi, non, je n'ai ni frère, ni soeur. Pourtant... commençais-je d'une voix un peu rauque, J'aurais pu. J'aurais eu une jumelle, si elle n'était pas morte à la naissance."

Puis je lui décrochais un sourire éblouissant afin de la distraire.

"Et, ta petite soeur, elle a quel âge? Elle s'appelle comment? questionnais-je. Je suis sûr qu'en réalité, tu l'aimes beaucoup. Tu es sa grande soeur, après tout."

Invité

Ça avait pourtant pris un temps fou, à Emi d’accepter sa petite sœur. Évidemment elle l’aimait, mais de dire « personne n’a le droite de la toucher » n’était peut-être pas le mieux, alors elle se ravisa de répondre à ça, se contentant d’hausser les épaules.

Un embarras encore plus persistant cette fois s’installait en elle. Il n’avait ni sœur ni frère, et pourtant… il avait été séparé de sa jumelle à la naissance. Même si à ce moment elle ne l’avait pas regardé, Emi avait bien remarqué le changement de ton qu’il avait adopté. Puis, lorsqu’elle le regarda à nouveau, c’était un sourire vraiment pétillant qui s’était installé sur ses lèvres.
- Elle… a onze ans, répondit-elle à sa question. Et elle s’appelle Amalie. Mais tu sais, je la détestais du fond du cœur lorsqu’elle est née, jusque très longtemps après. Peut-être que je l’aime bien maintenant. Je ne sais pas vraiment…

Etant petite, Emi haïssais sa sœur pour la préférence que ses parents lui portaient. Ils la dorlotaient, la gâtaient, s’occupaient d’elle et pire pour Emi, l’aimaient vraiment… Ça ne faisait que quatre années qu’elle avait appris à la connaître en revenant chez elle lorsque ses parents n’étaient pas là. Elle y avait trouvé une petite fille assez timide, mais très épanouie. Elle s’était dit qu’elle aurait été ainsi si ses parents l’avaient aimée.

- Même si je suis sa grande sœur… Je ne suis jamais chez moi et c’est tout le temps elle qui vient me trouver. C’est pour ça que je dis qu’elle me tape sur les nerfs…

Emi poussa la porte de la salle. Une grande salle au haut plafond, munie d’un grand piano à queue. Elle referma la porte directement, le rouge aux joues. C’était exactement ce qu’elle cherchait, une salle comme cela.

- C’est… C’est bon. Je sais où c’est maintenant, dit elle en se mettant sous le bras de Yaël.

Elle n’avait pas l’habitude de jouer en public, et craignait qu’il lui demande de jouer quelque chose.

Invité

Elle me parla rapidement de la relation qu'elle avait avec sa soeur; visiblement, ce n'était pas l'amour fusionnel. Mais sans me laisser le temps de lui poser une autre question, elle quitta mon bras et poussa la porte de la salle de musique et regarda à l'intérieur; de là où j'étais, j'aperçus une salle à plafond haut, avec une estrade sur laquelle était positionné - ou du moins, le pensais-je - un piano ou autre instrument.
Mon hypothèse se révéla fondée, car, lorsqu'elle revint contre moi, elle dit que "c'était bon". J'en compris qu'il y avait ce qu'elle cherchait, à savoir un piano.

Je lui décrochais un sourire, et, sans la lâcher, poussais à mon tour la porte, jetant un oeil à l'intérieur. Je fus impressionné par la taille de la salle, sa hauteur, ses dimensions. Il devait y avoir une résonance incroyable là-dedans... Je me tournais vers Emi et, ne remarquant pas son petit air contrit, lui demandais, pétillant:

"Emi, s'il-te-plaît, tu ne me jouerais pas un petit morceau? et, lui attrapant doucement la joue: Juste un petit morceau! Pas longtemps!"

Et de lui décrocher le genre d'expression insistante mais adorable. (^^)

Invité

Et comme elle l’avait bien pensé, Yaël l’invita à jouer quelque chose. Elle n’eut le temps de dire « non » « hors de question » ou quelque chose comme cela, qu’il insista davantage en lui prenant délicatement la joue, affichant une expression qui lui fit penser à Amalie lorsqu’elle lui demandait de venir la chercher après le collège.

Qu’allait-elle faire…? Jouer ou ne pas jouer ? Certaines pensées se mettaient en place. Déjà, elle pensait que, si elle jouait devant lui, elle allait se tromper, qu’il allait voir quelque chose qu’elle ne voulait pas qu’il voie, et qu’il serait vraiment la première personne à être en face, à côté ou derrière elle, l’écoutant jouer.

- Euh… Je ne sais pas…

Haha. Elle s’était de toute façon, fait avoir puisque déjà, elle avait posé un pied dans la salle.

- Bon… D’accord… lâchait-elle en passant devant Yaël.

Le bruit de ses talons résonnèrent encore plus que dans le couloir et, une certaine nostalgie s’empara d’elle, pour une raison qu’elle ignorait. Longeant le piano, elle laissa ses doigts parcourir l’imposant instrument à la couleur noire vernie, qui laissait même refléter son image.
Lentement, elle s’assit sur le tabouret, voyant que Yaël était près d’elle, Emi se retourna vers lui, attrapant du bout des doigts, les siens qu’elle frôlait doucement.

- A une condition : que tu te retournes.

Et elle était très sérieuse. Sans doute allait-il penser que c’était une réaction de petite fille, mais c’en était tout autre. Raison personnelle, qui ( pensait-elle ) risquerai de la choquer, voire de le dégouter, ou même d’avoir un peu peur. Ces marques cicatrisées. Ayant l’habitude de relever ses manches pour jouer, afin de se mettre plus à l’aise, elle ne voulait pas faire apparaître devant lui, ces cicatrises importantes.

Invité

Ma première victoire face à la demoiselle! J'étais tout content, et la suivis dans la salle, ravis. Ne la lâchant pas d'une semelle, je me postais juste à côté d'elle pour pouvoir la voir jouer. C'était une chose que j'aimais faire; regarder les doigts des gens lorsqu'ils jouaient de la musique ou autre. Seulement, Emi ne commença pas tout de suite; elle vint frôler mes doigts, et m'opposa une condition: je devais me retourner. Je haussais les sourcils; c'était quoi, cette condition?
Je pris un air têtu et décidé.

"Je suis désolé, protestais-je, mais je ne vois pas pourquoi tu me demande ça! Tu n'aimes pas qu'on te regarde jouer? Je ne te dérangerais pas!"

Puis je me plaçais derrière elle, ne voulant rien entendre, et me penchais vers elle, passant mes main sur son ventre.

"Regarde, tu ne me verras même pas, lui soufflais-je en l'embrassant sur la joue. Je ne te dérangerais pas."

Malheureusement pour elle, j'étais têtu et obstiné; pour que je fasse quelque chose, ou accepte de ne pas faire, il fallait que je comprenne et qu'on m'explique pourquoi. Je n'aimais pas obéir aveuglément. Et là, même si c'était Emi, c'était la même chose.

Invité

Elle ne répondit pas, l’écoutait parler, protester.

- Tu es tenace, hein… murmurait-elle tandis qu’il posait ses mains sur son ventre.

Relevant ses bras, jusqu’à attraper le cou de Yaël qui était derrière elle, la jeune femme soupira longuement.

- Je n’ai pas envie que tout soit gâché si soudainement… par les bêtises que j’ai faites auparavant… soufflait-elle en lâchant ses bras du cou du jeune homme.

Emi se leva du tabouret, passa ses bras autour de la taille de Yaël, et le fit avancer de l’autre côté du piano. Non, elle n’allait pas céder aussi vite, même si c’était lui qui la suppliait.

- Il y a… commençait-elle en montant ses mains sur son torse, la tête appuyée sur son dos. Des choses que je regrette d’avoir faites, et que j’aimerai oublier… Mais si tu te retournes… Elle s’arrêta, en serrant la chemise de Yaël entre ses doigts.

- Enfin bon… Fais comme tu veux, je ne t'oblige plus à rien maintenant.

S’empressant de retourner sur le tabouret après l’avoir embrassé sur le front, elle enfonça la touche de sol avec son pouce, pour vérifier sa sonorité. Un son parfait, clair. Sans hésiter, elle releva les manches de sa veste qui lui arrivait en dessous de la poitrine, puis parcouru de ses doigts les cicatrices qu’elle s’était faites, quelques années auparavant. Des marques de cutter et de couteaux. Une quinzaine à chaque bras, dont certaines s’étaient effacées. En revoyant cela, Emi eut un petit haut-le-cœur. Ça la dégoutait elle-même, l’écœurait, et ça lui faisait mal au ventre.

Plaquant ses doigts fins contre les épaisses touches d’ivoire du piano, elle commençait à jouer quelque chose d’effroyablement triste, complètement dépressif, même. Mais elle ne s’en rendait pas compte. Un air qu’elle avait créé à l’âge de six ans, mais qu’elle avait amélioré plus tard. Si cette mélodie lente aux sons graves était parfois ponctué d’un « si » aigu, c’était l’espoir qu’elle avait mit en ses parents. Espoir qui n’avait pas été perçut, d’ailleurs.

Regardant devant elle d’un air vague, elle ne porta pas un regard à Yaël. Après tout, s’il était derrière elle, ou resté là où elle l’avait fait se retourner, ça lui importait peu, maintenant. S’il voyait ces cicatrices, s’il pensait à tort, s’il la méprisais, maintenant, ça ne lui importait peu.
Mais ça, c’était ce qu’elle aurai pensé si elle ne l’aimait pas.

En réalité, tout en jouant cet air sombre qu’elle aimait tellement, laissant parcourir ses doigts sur les touches, elle se disait que, même s’il était derrière, à côté ou retourné vers elle, elle ferait avec. Il verra ce qu’il verra, et pensera ce qu’il pensera. Peut-être même qu’il ne remarquera pas ces traces de mutilation qu’elle détestait tant, sur ses bras blancs, mais honnêtement, c’était impossible de ne pas le remarquer.

Finalement, elle pensait qu’installer une confiance totale envers celui qu’elle aimait n’était pas si mal. D’habitude, elle ne le faisait jamais, mais là, elle sentait que ce serait différent.

Lorsqu’elle eut fini son morceau, elle prit soin de dérouler les manches de sa veste sur ses bras, jusqu’à ses mains, ferma les yeux et questionna celui qui l’écoutait.

- Yaël, c’était comment ?

Ce qu’elle voulait entendre, c’était la proximité de sa voix, ainsi, elle serait en mesure de savoir s’il avait vu ses bras, ou s’il était resté retourné. Mais elle espérait pouvoir sentir ses mains, sur son visage.

Invité

Elle me mena d'elle-même de l'autre côté du piano, voyant bien que je n'irais pas tout seul. Elle me parla de choses qu'elle regrettait, etc. Je levais un sourcil; pas que je m'en fichais, mais... quel rapport? De plus, elle déclara ne plus m'obliger à rien. Eh bien, tant mieux! Je me demandais vraiment en quoi cela la dérangeait que je la regarde jouer. Elle était si timide? Non, tout de même pas...
Elle déposa un baiser furtif sur mon front avant de revenir au tabouret, et comme il fallait s'y attendre, je me retournais. De là où j'étais, ses bras, même dénudés, m'étais cachés par le piano lui-même. J'essayais de changer d'angle, mais avant que je ne les vois, elle commença.

Lorsque le son de la première note retentit, je m'arrêtais et tendis l'oreille. Quelle mélodie triste! Pleine de tristesse et de déception, d'idées noires et de faux espoirs. Les yeux dans le vide, je redoutais chaque prochaine note. Et lorsque la mélodie pointait vers les aigus, je ne pouvais m'empêcher d'avoir, devant les yeux, le sourire bienveillant de ma mère. Puis l'image se fit plus précise; les notes dessinaient son regard maternel, sa chevelure de lumière, sa peau douce, sa robe d'été. Bientôt, elle m'apparut, un peu devant moi; les yeux humides d'émotion, le coeur battant, toujours porté par la mélodie déprimante, j'avançais de quelques pas; l'image de ma mère changea, et c'est Emi, assise devant le clavier, que je voyais maintenant.

J'ouvris de grands yeux, horrifié.
Ses bras portaient les marques barbares de mutilations. Etait-ce donc de cela, qu'elle me parlait à l'instant...? Ces choses qu'elle regrettait et voulait oublier...? Je me demandais par quels moments terribles avait-elle dû passer pour en venir à s'auto-mutiler. Les hypothèses les plus horribles se proposaient à mon esprit troublé. La mélodie n'arrangeait rien; le son dessinait dans mon esprit le regard d'Emi emplis de larmes et de tristesse.

Et puis la dernière note sonna.
Je me rappelais que que j'avais été chamboulé par l'image de ma mère, et m'empressais d'écraser les larmes naissantes qui menaçaient de rouler sur mes joues. Mais c'était inutile, car Emi ne me regarda pas. A vrai dire, elle avait même fermé les yeux. Elle me demanda comment c'était.
Je m'avançais silencieusement d'elle, et, doucement, passais ma main sous son menton.

"Affreusement magnifique... soufflais-je en déposant un léger baiser au coin de ses lèvres. Magnifiquement triste..."

Puis je retirais doucement ma main et m'éloignais un peu, face au reste de la salle. J'étais encore ému par ce que je venais de découvrir; cette mélodie triste me hantait, et la vision de ses bras couverts de cicatrices me faisait froid dans le dos.
Je me rappelais un soir où mon père et moi nous étions retrouvés devant un reportage sur ces comportements. Un profond mal-être, un rejet de soi, tant de choses qui pouvaient pousser une personne à se mutiler. Et mon père de remarqué avec mépris: "ils sont pas bien dans leur tête, ceux qui font ça!"
Mais Emi avait dit que c'était du passé...

Je ne savais plus trop où j'en étais; une personne qui était tombée si bas un jour pouvait-elle vraiment faire une croix sur un passé aussi sombre...? N'en restait-il pas des séquelles...? L'idée qu'elle ne gardait pas que ces cicatrices sur les bras me fit frissonner; son coeur aussi, devait être plein de traces.
Mais dans quoi m'étais-je embarqué...? Voilà ce que c'était, que de sortir avec quelqu'un sans même avoir cherché à la connaître...

Invité

Les yeux clos, elle eut ce qu’elle espérait. Son toucher et son baiser lui prouvaient qu’il ne s’était pas contenté de rester bien sagement retourné. Elle émis l’hypothèse qu’il avait vu ces effroyables marques du passé. En ouvrant les yeux, elle vit que Yaël s’était un peu éloigné, et qu’il avait l’air frustré, perdu dans ses pensées. Bien qu’elle n’avait aucune idée de ce qu’il pouvait bien penser, il y avait au moins la question que toute personne se demandait en voyant de telles marques. « Continue-t-elle ? ».

Se levant du tabouret, Emi se positionna à côté de Yaël. Sans le regarder, elle leva un peu son bras gauche recouvert, passant sa main dessus.

Une personne qui se mutile, personne jeune, cache très souvent le besoin. Dans le cas d’Emi, c’était le manque d’amour, le rejet de ses parents et la violence que lui faisait subir parfois sa mère qui l’avait poussée jusque là. Elle en était venue à se dire que ses parents ne l’aimaient pas, et elle n’avait pas tort, mais une vérité si blessante, aux oreilles d’une petite fille de six ans n’était pas surmontable. Elle savait aussi que, si elle se mettait en colère, sa mère la frapperai, alors, au lieu de s’énerver, elle se faisait du mal pour compenser.

Avant cela, à chaque fois qu’elle appelait à l’aide lorsqu’elle ne se sentait pas bien lorsqu’elle était malade, souffrante, c’était toujours les domestiques qui venaient. Elle avait beau appeler ses parents, ils l’ignoraient, ne voulant l’entendre. Pendant des années elle s’était accrochée, sans pouvoir aller plus haut, alors elle avait commencé à se faire du mal. Mais c’en était fini depuis deux ans et demi !

- C’était pour ça, dit-elle, que je ne voulais pas que tu me regardes jouer… Mais c’est bon, maintenant, c’est fini. Il y a des années que je ne fais plus ça. J’ai eu le soutien de mes amis, et ça m’a aidée à arrêter.

Emi s’asseyait sur l’estrade, laissant le haut de son corps se poser à terre. Allongée, elle regardait le haut plafond voûté. Tant de choses qu’elle ne lui avait pas dites, mais il avait découvert le plus gros de ses problèmes. C’était déjà un soulagement, même si elle ne savait pas comment il l’avait pris.

« Saki, Ichiru… pensait-elle, je les ai inquiétés pendant si longtemps… Si maintenant je devais faire peur à Yaël… Je pense que… Je… pense que cette fois… Je ne m’en sortirai pas… »

Certes, elle ne se mutilait plus, mais mentalement, elle ne s’en sortirai pas. Cette force qu’elle s’appropriait envers les gens n’était pas juste une image, mais c’était quelque chose qui se « cassait la gueule » à proprement parler, très lentement, mais sûrement.

- Dis… dit-elle lentement, à l’adresse de Yaël, tu n’as pas peur, hein ?

Invité

Je restais impassible lorsqu'elle arriva à côté de moi, lorsqu'elle me parla. Je gardais le regard fixe, perdu dans des limbes de doutes. Elle avait arrêté depuis plusieurs années. Déjà, cela me rassurait. Ses amis l'avaient soutenue. C'était tant mieux, seul on replongeait facilement.
Cette pensée me claqua en pleine figure. "Seul, on replonge facilement." Ne m'avait-elle pas dit qu'elle n'avais pas d'amis, ici, à Shimizu? J'étais le seul qu'elle connaissait, qui pouvait l'arracher à la solitude. Sans quoi, peut-être retomberait-elle dans cette abîme profonde qu'est le désespoir...

Mes doutes furent remplacés par un curieux sentiment de responsabilité. Je ne pouvais pas risquer de la voir retomber. Je ne pouvais pas l'abandonner à ce triste sort.
Et puis, au-delà de cette responsabilité, il y avait ce que j'avais ressenti, mon attirance pour elle qui m'avait fait aller au-delà de ma froideur, puis de la sienne ensuite. Je ne pouvais pas l'abandonner. Non, décidément, je ne pouvais pas.
Même si mes sentiments s'arrêtaient pour l'instant à une simple attirance, je me sentais tout de même responsable d'elle, de ce qu'elle allait devenir, de son bonheur.

Elle s'assit puis s'allongea, les yeux aux plafond. Sa voix claire s'éleva, inquiète.

"Dis… Tu n’as pas peur, hein ?"

Pendant un instant, je ne dis rien. Sa phrase résonnait comme un appel au secours dissimulé. Je penchais la tête légèrement d'un côté, puis de l'autre, avant de répondre lentement.

"Eh bien... Peur, non... énonçais-je d'une voix sans timbre. Je suis... Surpris?... Disons que c'est assez... inattendu. Comment dire..."

Il y eut un instant de silence pendant lequel je cherchais mes mots. Et puis finalement, je ne les trouvais pas. Je lâchais un soupir. Je m'assis à mon tour à côté d'elle. Puis, pour toute action, je lui saisis doucement la main et levais lentement son bras. Je tirais doucement sur son habit pour découvrir son poignet, où l'on apercevait la fin de l'une des cicatrices, et vint y déposer un baiser. C'était plus pour la signification que pour le geste lui-même que j'avais fait ça. Puis je me penchais vers elle davantage encore, et déposais un baiser sur son front. Penché au-dessus d'elle, je la regardais; je ne souriais pas, mais je ne la repoussais pas pour autant.

Invité

Il y eut un temps durant lequel aucune réponse ne se fit, laissant Emi face à de nombreux doutes. S’il lui fallait autant de temps pour répondre, elle craignait la réponse.

Lorsque sa réponse lui parvint, elle semblait assez confuse. Bien qu’il avait déclaré ne pas avoir peur, le timbre de sa voix venait ajouter quelque chose de perturbant. Sa phrase restait en suspend.

Il s’assied à côté d’elle, et souleva une de ses manches, de pas bien haut, mais de sorte à ce qu’une marque apparaisse. Etonnée, elle retint son souffle, jusqu’à ce qu’il embrasse cette empreinte, et son front. Emi ne savait pas bien que penser. Entre sa réponse confuse et son baiser, elle se sentait perdue, déroutée, comme s’il manquait quelque chose. Ses yeux plongés dans ceux de Yaël dérivèrent lentement sur son visage, jusqu’à ses lèvres. C’était cela qu’il manquait. Ses doigts froids s’y posèrent, tandis que de son index, elle parcouru sa lèvre inférieure qui ne formait pas de sourire.

- J’en étais sûre… chuchota-t-elle en attrapant une mèche des cheveux clairs de Yaël entre son pouce et son index, de l’autre main.

Là, elle se sentait très mal. Si elle n’avait pas mit un pied dans cette salle, si elle n’était pas entrée, si il n’avait pas insisté, si elle n’avait pas joué, cette situation ne serait jamais arrivée. Depuis longtemps elle n’était plus habituée à ce qu’on lui voie ces marques, et après deux ans, ça recommençait. Elle qui essayait d’oublier, se retrouvait face de nouveau, avec ce même problème.

- Quand je vois ça, dit-elle sur un ton faible en regardant son bras droit, je perçoit juste la petite fille en manque d’affection. Mais depuis, des choses on changées, et c’en est fini. Mais, si tu me fais un pareil visage, que devrais-je penser ?

Invité

Elle attrapa une mèche de mes cheveux d'une main, tandis que ses doigts parcouraient mes lèvres; ce geste était voluptueux, doux. Elle me parla du manque d'affection qu'elle avait eu, et je cru comprendre que c'était ce défaut d'amour qui l'avait poussée à se faire ces marques. Elle m'assura que c'était fini, regardant son bras blessé; son regard était triste.

"... Mais, si tu me fais un pareil visage, que devrais-je penser ? questionna-t-elle sur un ton faible."

Je ne dis rien; je me posais des questions. Elle disait avoir manqué d'affection mais que c'était révolu; mais l'était-ce vraiment? N'allait-elle pas me demander de lui donner de l'affection? Si c'était le cas, je ne pensais pas pouvoir le faire; on m'avait déjà reproché à plusieurs reprises d'être froid avec mes petites amies, malgré mon dévouement. Alors, si je n'étais pas capable d'être tendre avec celles que j'aimais, comment pourrais-je l'être avec une fille que je connaissais à peine...?

Mais je me dis qu'il ne fallait être pessimiste; après tout, justement, cela ne faisait pas longtemps que je la connaissais, et peut-être avais-je encore des choses à apprendre sur son sujet. J'espérais qu'elle ne cachait plus de secrets aussi morbides que ces traces de mutilation; déjà, ça, c'était fort, alors s'il y avait autre chose en plus...
Je ramenais mon regard vers elle; l'ombre d'un sourire étendit très légèrement mes lèvres, tandis que je me penchais et embrassais le bout de son nez. Enfin, je me décidais à lui répondre.

"N'en pense rien, soufflais-je à mi-voix. Ne reperds pas espoir à cause de moi... Je ne tiens pas une place assez importante dans ta vie pour avoir le droit de l'influencer."

Une lueur de tristesse passa dans mon regard, avant de disparaître aussi vite qu'elle n'était arrivée...

"Ce serait bête de gâcher de bons moments de ta vie à cause d'un type comme moi! ajoutais-je avec un sourire factice."

Invité

« Ne rien penser », « ne pas reperdre espoir à cause de lui », « ne pas tenir une place assez importante dans sa vie ». Là, il en disait des choses qui passaient au-dessus d’Emi.
Elle avait vraiment du mal à penser qu’il était sûr que cette histoire était finie pour de bon et que rien ne la pousserai plus jamais jusque là. Comment pourrait-elle faire, pour le convaincre davantage ? Il lui paraissait si incertain…

Peut-être aussi que la phrase de la fin était de trop. Comment Yaël pourrait-il gâcher certains moments de sa vie ?! Et qu’est-ce que c’était que ce sourire forcé, juste là ?

Emi se releva en prenant Yaël par les épaules, l’air effaré. Il avait bel et bien peur de quelque chose.

- Mais… Puisque je te dis que c’est fini…! Jamais je ne referai une chose pareille ! J’en ai pris conscience, tu sais ! Peut-être un peu tard, c’est sûr, mais ce n’est pas la peine de… penser ça ! Sa voix s'était légèrement affaiblie sur la fin.

Emi sauta de l’estrade et appuya ses mains sur les genoux de Yaël, le regardant avec peine en levant la tête. C’était d’autant plus éprouvant pour elle de se dire qu’il se sentait inférieur à on-ne-sait quoi.
- Encore une chose : ma vie je la vis pour moi-même parce que je sais qu’elle est courte, alors tu n’as pas de responsabilités à prendre pour ça,soupirait-elle en souriant faiblement.

Évidemment, elle ne disait pas cela dans un mauvais sens.
D’habitude les sentiments qu’elle éprouvait pour quelqu’un n’étaient pas partagés, même si elle sortait avec cette personne. Alors quelque part, elle avait peur que ça ne dure trop longtemps comme ça. Et puis cela ne faisait pas longtemps qu’ils se connaissaient tous les deux, et déjà Yaël en savait plus qu’elle n’en savait sur lui.

Invité

Elle me saisit les épaules, descendit de l'estrade, m'attrapa les genoux tout en parlant. Elle voulait me convaincre que c'était finit, qu'elle ne recommencerait plus. La flamme de son regard me montrait sa détermination, et me poussa à la croire, lui faire confiance; elle semblait pleine de volonté, elle arriverait sûrement à tenir parole et ne pas retomber dans l'auto-mutilation.
Mais la seconde partie de son discours, comme quoi elle vivait au jour le jour et pour elle-même, je ne pus m'empêcher de lui prendre une main et lui répondre sur un ton vif:

"D'accord, mais tout de même; imagine qu'à cause de moi, tu recommence à déprimer et fasse une bêtise? - je m'empressais d'ajouter: - Pas forcément refaire... ça, hein! Je te crois quand tu dis que tu ne le referas pas. Mais, une bêtise, rien que pleurer à cause de moi le serait! Et ce sera de ma faute! Je ne pourrais pas penser autre chose!"

Et puis, ma voix perdit en ardeur, et je finis plus doucement:

"Je m'en voudrais terriblement!... Je n'ai pas envie de provoquer ton malheur... "

Je détournais le regard, mes joues prenant une légèrement teinte rose. Ca ne me ressemblait pas de parler aussi ouvertement. Je m'exprimais avec des mots maladroits - ma gaffe sur le mot 'bêtise' en était une démonstration - et d'un ton mal assuré; c'était pas mon truc, la discussion philosophique, les débats sentimentaux. C'est pourquoi je me tus, n'en rajoutant pas plus, craignant de dire quelque chose qui pourrait mettre le feu aux poudres.

Invité

La main de Yaël s’appuya sur la sienne rapidement, à peine lorsqu’elle eut fini de dire ce qu’elle avait à dire. Il parlait vite, et s’inquiétait, craignant que les larmes qu’elle verserait dans un futur subjectif, ne seraient causées par lui. Et puis sur un ton plus doux, parce que moins assuré, il lui émettait que si une telle chose pourrait arriver, il s’en voudrait.

Autre chose, il avait parlé du malheur qu’il risquerai de causer. Cela ne passait pas dans oreilles d’Emi. Elle n’ignorerai pas tout ce qu’il venait de dire, mais prendrai soin de faire comme si elle n’avait pas entendu le mot « malheur ». C’est-ce qu’elle fit. Aucun malheur ne pouvait tomber sur elle, elle en avait déjà été accablée. La jalousie, la haine, l’amour profond, l’autodestruction, le rejet et l’abandon. Rien ne pouvait lui arriver de pire, et ce n’était certainement pas Yaël qui l’en accablerai de nouveau.

Tandis qu’il détournait son regard, Emi le suivait des yeux en souriant. Lui avait-il parlé à cœur-ouvert ou était-il de nature ouverte ? Qu’importe, elle avait apprécié sa façon de lui dire tout cela.

- Dans ce cas, dit elle en attrapant son menton entre son pouce et son index en esquissant un sourire. Taches de ne pas me faire pleurer, si tu en as si peur… finit-elle.

Puis elle laissa sa main tomber sur le genou de Yaël. Elle lui prit les deux mains en posa sa tête sur leurs mains en fermant les yeux. Certes, elle était fatiguée de son voyage de près de cinq heures de voiture, mais ce n’était pas pour cela qu’elle avait posé sa tête sur ses genoux de manière enfantine. Elle se sentait un peu plus apaisée ainsi. Elle aurait donné beaucoup pour enlever ce sentiment qu'il avait, donné cher pour recommencer ce moment.

Ces traces sur ses bras étaient quelque chose qui lui faisait se souvenir de sa faiblesse morale chaque jour ; en se levant le matin, en se couchant le soir, et simplement en respirant. Si elle avait des amis si proches comme Saki et Seiji, c'était bien grâce à ces marques car c'étaient eux qui l'avaient tirée de ce cauchemar.
Aujourd'hui, elle regrettait la douleur inutile et le pourquoi elle s'était fait cela. Mais, si elle n'avait pas eu ces cicatrices, elle n'aurait pas, même jamais, tissé des liens aussi forts. Cependant elles avaient choqué Yaël alors qu'Emi s'était habitué à vivre avec.

[HJ: Bwawawa... Non, je me fiche du résultat de ce post. Vraiment pas d'inspi'...]

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Elle posa sa tête sur mes genoux; son geste m'étonna, je ne m'y attendais pas, mais je la laissais faire. Je pris ça comme un signe de fatigue. Je posais une main sur sa tête et commençais à caresser doucement ses cheveux blonds. Dans a tête, pas mal de choses se bousculaient; déjà, premièrement, je m'étais dégoté une petite amie vitesse grand V, première fois que j'allais aussi vite en besogne. Ensuite, quelques minutes après, j'apprenais qu'elle s'était auto-mutilée mais avait arrêter. Et puis maintenant, il ne fallait pas que je la fasse pleurer, ou je m'en voudrais. Ca faisait beaucoup de chose pour ma petite tête.
Et, bien sûr, avec tout mon tact et ma diplomatie, je déclarais à mi-voix:

"Malheureusement, cela, je crains de ne pas pouvoir te le promettre, Emi-chan..."

Encore une première; le surnom affectueux. Pourquoi, je ne savais pas trop, c'était venu comme ça, spontanément. Je me penchais et posais mes lèvres sur sa tête, avant de me redresser et me laisser aller en arrière, allongé sur l'estrade, mains derrière la nuque. J'observais quelques instants le plafond, avant de me redresser sur un coude et regarder Emi. Je tendis une main et, du bout du doigt, frôlais l'arrête de son nez. Ce petit geste n'avait pas de signification précise. Encore du spontané. Décidément, mon cerveau semblait frôler la surchauffe et s'être mis en veille. La tête appuyée sur ma paume, de l'autre je vins effleurer sa joue, pour finir mon mouvement au coin de ses lèvres. Je la regardais encore, puis continuais à jouer avec ses cheveux.

Des cheveux blonds. Comme ma mère. Si elle avait eu des yeux bleus, elle lui aurait peut-être ressemblé. Je me demandais à quoi ressemblerait Emi avec des yeux bleus. Elle serait sûrement encore plus jolie. Je songeais à ces lentilles de couleurs que l'on pouvait acheter; j'en parlerais avec Emi. En attendant, elle avait des yeux gris-verts, qui n'étaient pas désagréables à regarder malgré tout. J'effleurais à nouveau le coin de ses lèvres, et plongeais mon regard dans le sien. J'attendais quelque chose, sans trop savoir quoi, et j'espérais qu'elle le comprendrais, par simple transmission optique...

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« Qu’est-ce que je viens de lui demander, moi… pensait-elle. Ça ne fait pas une journée que l’on se connait et je lui demande des choses complètement… complètement… ».
Le « Emi-chan » qu’elle venait d’entendre avait un peu bousculé ses pensées. Bien sûr il pouvait l’appeler comme ça, mais c’était assez inattendu.

Yaël s’était quant à lui affaissé, restant un court moment sur le dos. Emi aurait voulu lui demander à quoi il pouvait bien penser, bien qu’elle ne soit pas vraiment curieuse. Les grandes mains du jeune homme s’étaient glissées sur son visage, lentement, et s’étaient éprises de ses cheveux blonds. D’une manière qu’elle trouvait enfantine, il avait la même manière que sa petite sœur adorée, Amalie de les lui toucher. Se rappelant soudainement qu’elle ne l’avait pas appelée de la matinée, Emi émit un son de surprise qui s’étouffa sur les genoux de Yaël. Il fallait au moins qu’elle aille la voir en fin de matinée aujourd’hui, puisque le jour actuel était samedi, jour d’école pour les primaires. Elle allait sûrement être très fâchée, Amalie, lorsqu’elle ne verra aucun message de sa sœur. Son petit visage pareil à de la porcelaine et ces grands yeux bleus presque marines tourmentés, ainsi que sa voix pareille au tintement aigue du cristal, pourtant si souple, tout cela allait se retourner contre Emi. Rien que d’y penser, elle frissonna. Sa sœur s’énerver, c’était assez comique à voir…

Les yeux levés vers les siens, si particuliers qu’elle aimait beaucoup, elle releva sa tête en même temps qu’il touchait ses lèvres. Même si son regard à elle était d’une froideur douce, il n’en était pas moins perçant. Le gris de ses yeux pouvait s’assombrir, jusqu’à former une étrange couleur verte très foncée dans une pièce n’était pas noyée de lumière. C’est-ce qu’il se passait à ce moment. Ce moment où le visage de la demoiselle s’approchait de son regard à lui, ce même moment où elle se mit sur la pointe des pieds.

Emi posa sa main sur son épaule, l’attirant juste un peu plus près d’elle. Voulant conserver cette image qu’elle avait à quelques centimètres de son portrait le plus longtemps possible sans que cela devienne un mal oculaire, elle ne ferma les yeux qu’au dernier moment, ce moment où elle l’embrassa encore une fois. Ses mains posées sur ses genoux se resserrèrent un peu sans lui faire mal évidemment. Ce baiser se répéta une seconde fois, puis elle l’embrassa sur la joue et dans le cou, avant de réussir à se hisser à sa hauteur, sur l’estrade. Là, elle l’enlaça, afin de loger son visage dans le creux de son cou. Ses doigts se posèrent à l’arrière de son cou, en le massant légèrement, comme si elle avait peur d’y briser quelque chose.

Bien qu’elle ne parlait pas, elle ne réfléchissait pas pour autant, laissant ses pensées, ses problèmes, ses quelques doutes et peurs de côté. Il y avait sans doute un inconvénient énorme à ne connaître que depuis peu, une personne. On n’était pas sûr de ses sentiments. Mais je l’ai dit, pour le moment, Emi avait laissé ses pensées, problèmes doutes et peurs, de côté.

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Plongé dans cet état secondaire, je me laissais faire. Je la laissais m'embrasser, m'enlacer, ne lui répondant que par automatisme. J'étais figé, pourtant mon corps continuait à se mouvoir sans trop que j'y prennes gare. Par automatisme, je répondis à son baiser, par automatisme, je l'enlaçais à mon tour. Ressentait-elle le peu de sentiments que je mettais dans mes gestes? Pour l'instant, elle était là, lovée dans mes bras, et ne semblait se rendre compte de rien.

Dans ma tête, un épais brouillard ralentissait ma réflexion.
Cette fille était belle et attirante. J'avais la chance, en moins d'une heure, d'avoir réussi à abattre les barrières qu'elle s'imposait. Ne devrais-je pas me satisfaire de cette situation? J'étais à peine arrivé qu'une fille loin d'être inintéressante me tombait dans les bras. N'aurais-je pas dû en ressentir une quelconque fierté?
Non, loin de la fierté, c'était une vague de doute et de culpabilité qui m'envahissait. J'étais en train de créer une attache entre elle et moi, attache dont je pourrais de mon côté me défaire sans la moindre difficulté. Mais serait-ce son cas également? N'étais-je pas en train de prendre une place que je ne désire pas dans son coeur?

Tout était confus en moi. Que devais-je faire? Il ne faisait nul doute que, si je restais aussi indécis, j'allais la faire souffrir plus encore. Je songeais que, en d'autres cas, s'il y avait eu le temps et les circonstances, j'aurais peut-être pu tomber amoureux d'elle. Mais il n'y avait eu ni le temps, ni les circonstances. Il n'y avait eu que de très rares cas où j'étais immédiatement tombé sous le charme d'une fille; cette fois-ci n'en faisait pas partie.

Je soupirais et pensais que, malgré tout, cela ne valait pas le coup de la quitter. Emi était très jolie, et semblait avoir un caractère qui conviendrait bien à ce que j'apprécies chez une fille. Mais je ne la connaissais pas encore vraiment; nous restions deux inconnus, liés précipitamment et sans avoir réfléchi. Peut-être aurais-je des sentiments pour elle, avec le temps? Non, je me connaissais bien pour savoir que seule une affection pourrait naître en moi pour Emi; j'avais du mal à me l'avouer, mais je doutais fort pouvoir un jour l'aimer sincèrement. Et le temps que cela demandait était contre moi: je n'étais fidèle que lorsque j'aimais. Qu'est-ce qui m'assurait qu'une autre qu'Emi n'attiserait pas en moi ces sentiments? Certes, je n'en viendrais jamais à la tromper, j'avais des principes, mais je ne pourrais pas rester avec elle alors que mon coeur était à une autre.

Mon esprit se dégagea pour conclure: certes, je n'étais pas amoureux d'Emi, et ne le serais probablement jamais. Mais j'avais tout de même peur de la blesser. J'avais besoin de savoir quelque chose.

"Emi... commençais-je d'une voix rauque. Quels sont... tes sentiments pour moi...?"

Les mots moururent dans ma gorge nouée. Il m'était difficile de lui demander ça, pas tant que la question elle-même état difficile à poser, mais plutôt que ce que j'y plaçais était lourd, et la réponse m'angoissait. J'espérais sincèrement qu'elle n'était pas amoureuse de moi, ou j'aurais d'autant plus de mal à la quitter par la suite...

» quand trop c'est trop. [Libre]
» Calme, calme comme l'eau...[Pv Tsuki](finit premiere partie)