The sweet escape from the golden cage [Zeke]

[3 semaines après le départ...]

L'arrivée.

....
" Nous n'allons pas tarder à atterrir. Veuillez relever vos tablettes et bien remonter votre siège. Nous vous remerçions et nous vous souhaitons un agréable séjour au Japon."
....

Je posai mon pied enfin sur le sol tant attendu et commençai à suivre Père sans me poser de question, telle une fifille à son papa. Un homme était à côté de moi, me tenant même la main d'une façon ferme et regardant le monde autour de nous d'un air aussi hautain que froid. Mon futur époux... Nous nous dirigeâmes d'ailleurs vers la sortie de l'aéroport pour prendre la voiture. Direction la rue où était située la robe blanche puis l'église [...] Cela vous est-il déjà arrivé de marcher dans la foule sans même vous rendre compte qu'elle vous entourait de toute sa nuisance ? Cela vous est-il déjà arrivé de croire que la signification de votre vous intérieur n'existait plus et qu'elle laissait place à un contrôle extérieur ? Rhaa je sais je me pose des questions bizarres... Mais bon, que faire quand on n'a plus le droit de parler ni même de faire quelque chose d'autre que de le suivre heure après heure, toute la journée sans répit.

Assise dans la voiture, perdue dans mes pensées, je regardais cette bague à ma main gauche briller de mille feux. Elle était assez petite en taille mais sa beauté était en quelque sorte immense. Mais je la regardais avec dégoût, je ne voulais pas de bague, ni d'argent, ni de penderie immense avec des servantes tous les dix mètres pour me servir. Je voulais juste lui ... Et rien que lui. Personne d'autre. Surtout pas ce futur mari qui ressemble à une potiche ou un toutou pour Père... Je la fis tourner dans mes doigts et levai mon regard de la bague pour le poser dans les rues abondantes d'habitants pressés. Quelques minutes après, la voiture s'arrêta au niveau d'une magnifique église, une des rares du coin mais la plus grandiose... Je sortis et me laissai entraîner vers la salle qui serait ma salle de torture mentale comme physique. Tout ça pour être belle aux yeux de tout le monde présent dans l'église pour assiter à ce faux mariage... Je peux vous dire que l'allée de celle-ci sera le lieu où on ne pourra plus rattraper ma descente rapide dans les ténébres du passé. Déprimant hein , ... Oui très. Mais réel.

On me glissa une longue robe blanche parsemée de quelque décoration de rose rouge. Elle était si longue que l'on pouvait marcher dessus, d'ailleurs je mis un temps à m'y habituer. Moi et ma maladresse légendaire. Puis à la suite on me serra le corset cce qui me coupa le souffle durant quelques secondes le temps qu'elles le serrent bien. On me fit enfiler des gants de la même couleur que la robe puis mettre des chaussures à talons aiguilles ... Quand je disais que c'était un torture physique, je ne mentais pas. Elles attaquèrent ensuite le maquillage et la coiffure m'arrachant presque le cuir chevelu à force de tirer pour les faire tenir en place. Une des servantes mit le voile dans mes cheveux et une finit son travail par une dernière touche de rouge à lèvres pour ensuite me faire tomber devant les yeux ce rideau blanc transparent.Elles m'aidèrent à me lever car corset plus talons plus maladresse est égal à catastrophes ... Surtout de ma part. On me fit marcher quelques pas pour me laisser devant un miroir aussi grand que le mur puis en un clin d'oeil toutes les servantes disparurent car on les avait appelées pour s'occuper au plus vite de quelque chose qui se passait dans les cuisines de l'autre côté de la rue.

J'étais seule dans la pièce et surement aussi dans les alentours. Ils devaient penser que j'étais incapable de m'enfuir vu la tenue que j'avais. Enfin seule ... J'avais cette apparence, cette poupée sans expression devant moi qui me regardait avec un air de solitude et de tristesse absolue... Je n'arrivais pas à me reconnaître. Avec tout ce maquillage et ses franfeluches qui ne faisaient que montrer quelque chose qui n'existait pas ... Je ne voulais pas de lui... Je m'approchais et posais la main sur le miroir. Pourquoi cela avait-il tourné comme cela ? Zeke m'avait acceptée, je pouvais enfin être à ses côtés ... Alors pourquoi je me retrouve dans cette situation avec cette tenue aussi belle que dégoutante. Je laissais glisser la main le long du miroir d'un air las. Je ne ressemblais plus à celle que j'étais. Je ne reconnaissais même plus mes traits... Zeke quand viendras-tu me chercher ?

Mes pensées furent coupées par la porte qui s'ouvrit et se referma presque directement. Un homme était là. Me faisant face. Je ne le reconnaissais pas alors que j'avais vu la plupart de tous les invités présents à ce mariage. Je plissais les yeux pour essayer de distinguer ses traits mais la lumière étant basse je n'apercevais qu'une silhouette au loin. Ca ne pouvait être lui ce n'était pas sa couleur de cheveux mais pourquoi mon coeur se mit à battre si fort rien qu'à la vision de cette forme lointaine ...

Qui êtes-vous ?

En trois semaines... Je n'étais que très peu sorti. L'envie n'y était plus, les choses tourbillonnaient dans ma tête. Ça faisait trois semaines qu'elle avait disparu. Trois semaines où j'étais resté à me morfondre et à me replier sur moi même. Je n'avais plus vu le lycée depuis belle lurette, de toutes façons je n'avais rien à y faire. J'avais rencontré, pour la première fois, ma femme de ménage qui ne passe que lorsque je suis déjà parti. Nous avions même fini par nous connaître, elle connaissait mon malheur, elle voulait que j'essaie d'oublier Valdania pour passer à autre chose. D'essayer de me relever, la tête haute, et de trouver une fille qui m'aimeras.. Mais je ne voulais que la fille que j'aimais.

J'ai déjà eu à oublier un amour. J'en étais tombé malade, je ne mangeais plus, j'étais à l'abandon, comme maintenant. L'oublier, comme pour la première fois m'était impossible. J'avais changé de personnalité, j'étais devenu un autre homme. J'avais été trop profondément touché.. trop pour pouvoir recommencer. Cette fois-ci, je serais incapable de me refaire une carapace. Valdania l'avait vraiment faite céder, trop progressivement pour la reconstruire. Je n'avais pas envie de lutter, je l'aimais trop, je préférerais en mourir plutôt que l'effacer de mes souvenirs.

Je buvais le soir, désespérément seul dans mon appartement spacieux, devenu trop spacieux à mon goût. C'était une première, je ne m'étais jamais senti aussi seul. J'apaisais ma solitude dans toutes les bouteilles d'alcool que je trouvais dans la maison. Vodka, whisky, gin, tequila.. j'avais toujours une réserve pour faire la fête, mais je n'en faisais plus. La deuxième fois de ma vie, où mes larmes étaient ma seule compagnie. J'avais honte, sur toute la ligne. De ne pas avoir pu la garder, de ne pas avoir pu la sauver des griffes imposantes, tellement plus que les miennes, de son père... de ma faiblesse, de mon état. Je cachais mon visage de la lumière du salon avec mon avant-bras, humidifié de larmes silencieuses.

Yoshi me laissait un tas de messages, pour savoir si j'allais bien, il avait entendu parler de mon accident, en recevant ma voiture dans sa casse. je lui répondis brièvement d'un "ouais" très peu convaincant. Les derniers jours, j'en reçus encore, me demandant si je reprenais les courses. Celui-ci je l'ignorai. Si je prenais le volant pour une course, j'aurais vite fait de me trouver un mur adéquat dans lequel me tuer... Puis j'en reçus un autre de la part de la secrétaire de mon père..

" Zeke, j'ai des invitations pour..."

Je laissai passer le message. Je n'avais pas envie de sortir, le monde s'obstinait à croire le contraire. Je partis vers mon canapé, avec une autre bouteille. Je ne fis même pas attention à son contenu. J'allumai la télé, pour prendre des nouvelles de ce monde qui me tuait à petit feu. Tout semblait normal dans la vie des gens, les émissions souriaient, on voyait des gens heureux dans les films.. déprimant. La chaîne people -ne demandez pas pourquoi je l'ai, elle est gratuite- attira son attention. Un mariage de notoriété publique semble-t-il. J'allais changer de chaîne..quand je vis le visage souriant de Mr. Hadlandra. Je ne pris pas de temps pour comprendre. Il souriait; il était heureux d'avoir vendu sa fille... Je vis tout, je la vis elle dans un coin de l'écran.. Et lui qui souriait encore aux caméras. Ma bouteille le lui retira sauvagement, préférant un écran noir et craquelé. Puis j'eus un petit déclic. Le téléphone..

Je retournai au répondeur, et repris le message de Nagi, la secrétaire personnelle de mon père.

"Zeke, j'ai des invitations pour un évènement. Elles sont pour ton père et ta mère. Une occasion pour toi de la revoir. Mais ce n'est pas seulement pour ça que je t'en parle. C'est aussi le mariage de la fille Hadlandra, je sais que ça te seras utile. Voici l'adresse..."

Je n'en croyais pas... Nagi m'aidait encore, elle me sauvait la mise pour la deuxième fois.. Je la rappelai. Un "merci pour tout.." étouffé de sanglots, je l'entendis sourire, et me dire d'y aller, et de ne pas gâcher cette chance.

Je regardai l'heure.. Quelques heures devant moi seulement. Je me ruai dans ma chambre, je n'avais plus le temps de traîner. Je pris une douche, et me rasai un peu, laissant encore une fine barbe le long de mon menton, et autour de ma bouche. Vu ce qui m'avait été promis par la garde de Mr. Hadlandra, le mieux était de rester inaperçu, Tout comme me refaire une couleur, je n'en avais plus le temps de toutes façons. Je regardai ma tête, puis sourit. Des cheveux blancs, voilà ce que je cachais derrière mon extravagance. Mais je souriais, ces vestiges de mon douloureux passé n'allaient pas s'élargir plus que ça..

Dans ma chambre, j'enfilai un smoking, d'un noir de jais, profond comme la nuit elle même, légèrement ouvert au col, le nœud papillon autour du cou. Puis je pris mes clés de voiture, et descendis par l'ascenseur. Dans le hall, je piquai une des roses décoratives, rouge et fraîche, et la mis dans ma poche. je fis tourner mes clés dans ma main. Je me sentais beaucoup mieux, mon assurance était revenue..

Dans ma voiture, je sortis mes lunettes de soleil de la boîte à gants, et sortis du garage. Je roulais doucement, pour ne pas attirer l'attention sur moi.. Je me garai à un pâté de maison, derrière un bâtiment adjacent à l'église. J'avançai dans la rue. Devant moi défilait un florilège de belles voitures, et de célébrités. Une foule de journalistes affamés prenaient chacun de leurs mouvements sur le long tapis rouge devant les marches de l'église. Un lieu de culte transformé en foire.. pathétique. je n'étais pas croyant, mais je respectais la religion des autres.

Derrière mes épaisses lunettes noires, je scrutais la scène. Tout le monde devait remettre son invitation à l'entrée. J'étais la dernière personne à laquelle Mr. Hadlandra en aurait envoyée une. Ses gorilles quadrillaient l'entrée... Je vis mon père arriver, aux bras de ma mère. Elle n'avait que très peu changé ces dernières années. Elle était mannequin dans sa jeunesse, mais elle resplendissait encore de beauté. Elle était contre la chirurgie plastique, mais sa beauté se conservait. Je l'adorais. Elle tourna la tête vers moi, comme attirée... et me sourit. Malgré mon apparence elle me reconnut. Je disparus derrière le mur, souriant moi aussi. Après quelques secondes, je ressortis, toujours à la recherche d'un plan pour m'y infiltrer.

Je vis après quelques minutes et une cigarette trois quarts, un groupe de bonnes femmes sortir des jardins, par une petite porte dérobée,et se diriger en face, dans le bâtiment contre lequel j'étais appuyé. Je jetai la cigarette à mes pieds, et l'écrasai du talon. Je pris un pas ferme, souple et décidé vers les jardins, en faisant attention de ne pas me faire voir. Les hommes avaient le dos tourné, j'avançai, aussi vite que possible mais l'air constamment décontracté, et j'ouvris la petite porte...

Une petite salle, au parfum fleuri un peu trop sur-dosé, des fleurs.. Et une jeune femme, cachée derrière un voile, dans une élégante et somptueuse robe blanche.. C'était elle, devant moi, dans une si belle robe..

Qui êtes-vous ?

Je ne répondis rien.. je m'approchai d'elle, et posai mes mains dans son cou, avant de lever son voile. Son maquillage était un peu trop complet... mais malgré ça, elle restait la belle Valdania que j'avais connu. Une larme dévala ma joue, malgré mon visage redevenu froid comme à son habitude.

"Valdania.. c'est moi.. c'est Zeke. Je suis venu te sortir de là. Je suis venu te reprendre à ceux qui t'ont enlevée à moi."

Je posai doucement mes lèvres sur les siennes. Doucement, je goûtai à nouveau à ce plaisir, le plus beau que j'eus connu en cette terre.

Mon coeur battait toujours aussi vite. Avait-il reconnu cet homme que moi-même avais du mal à deviner ? La silhouette commença à avancer doucement vers moi. Comme par une peur incertaine, je reculai de deux pas me collant ainsi contre le miroir qui se trouvait juste derrière moi. Aucun des invités n'avaient le droit de rentrer dans cette pièce. Père l'avait même crié haut et fort. Qui oserait le contredire ? Ils avaient tous peur de lui autant que j'en avais horreur. Mon propre père m'effrayait et ce de tout mon être. Depuis qu'il avait appris que Zeke m'avait "touché", ses mots étaient plus durs et crus qu'avant. Ils coupaient autant qu'une lame. Ils me brisaient. Ils me blessaient, laissant une plaie béante sur un coeur qui sans armure se défendait bien mal à ses assauts.

L'homme s'approchait toujours dans un silence implacable. Mon coeur lui s'affolait au fur et à mesure de ces pas. Je pense même que l'on pouvait l'entendre à n'importe quel endroit de cette pièce. Que me voulait-il ? Il entra dans la faible auréole de lumière d'une petite lampe posé sur une table. Ses traits sortirent de l'ombre. Ils me paraissèrent de plus en plus familier . Je le connaissais. Je l'aimais ... Il passa ses mains derrière mon cou et se rapprocha. Un frisson parcoura mon dos. Ce n'était pas de la peur... C'était tout sauf ça. Il souleva ensuite ce voile de devant mes yeux. Rien qu'à ce geste, la porcelaine qui entourait mon visage depuis que j'étais revenue auprès de Père, s'effondra. Une larme dévala ma joue et tomba en silence sur le sol. Je ne pouvais articuler un seul mot. Un rêve ? J'espèrais que ce soit plus que ça. Je voulais une réalité. Quelque chose sur quoi m'accrocher. Je ne voulais plus de fausses illusions qui me laissent tomber un peu plus bas à chaque fois. Je regardais le sol hésitant à rencontrer son regard. Une autre larme tomba au sol mais cette fois-ci ce n'était pas la mienne mais une des rares et précieuses de ... Zeke.

"Valdania.. c'est moi.. c'est Zeke. Je suis venu te sortir de là. Je suis venu te reprendre à ceux qui t'ont enlevée à moi."

Il n'avait pas besoin de le dire, je le savais... J'avais même prié pour que cela arrive. Je ne crois pas en une force supérieure. Mais quand on a plus d'espoir tous les moyens sont bons pour survivre... Il s'approcha encore un peu plus près de mon visage mais je ne vis pas la suite. Mes yeux se fermèrent sur tout. J'oubliais que Père pouvait rentrer dans la salle d'un instant à l'autre. J'oubliais ce passage effrayant de ma vie. J' oubliais mes mains blessées et ce coeur ouvert et même déchiré... Car il était juste là, tout près de moi. Je passais mes bras autour de son cou et me levais sur la pointe des pieds pour ressentir un peu plus cette chaleur qui m'avait tant manqué. Ce rêve que j'avais fait tant de fois, montrait enfin le bout de son nez dans ce monde sans aucune couleur. Il m'apportait sa touche de douceur. Un rêve coloré. Un songe de tout ce qu'il y a de plus doux... Je rompis le contact puis posai ma tête contre son torse. Les larmes que j'avais refoulé depuis trois semaines se révèler au grand jour et je ne pouvais rien arrêter. Cachant mon visage avec mes mains, je les laissais déborder de mes yeux. Comme si seule la présence de Zeke était la clé de mes sentiments enfermées. Au diable le maquillage, la coiffure et autres choses tout aussi futiles... Après quelques secondes, je m'écartais de lui, essuyant mon visage de mes larmes et le regardai dans le détail. Un sourire apparu sur mon visage malgré tout ce qui pouvait se passer autour de nous. Je posais un doigt sur ses lèvres pour enlever le rouge que je lui avais laissé et laissais glisser ma main le long de sa joue. Sa peau qui était si lisse, était maintenant recouverte d'une fine barbe. De l'autre main j'attrapais une mèche de ses cheveux et la fis glisser. Ils étaient noirs, on pouvait dire qu'ils avaient la même couleur que le smoking qu'il portait malgré les quelques nuances de blanc qui se contrastaient à certains endroit.

J'avançais un peu, me retrouvant de dos à Zeke. Je glissai une main dans mes cheveux pour enlever le voile qui tenait le chignon fermement. Les servantes avaient été efficace... Je le jetai d'un geste brusque vers le miroir, laissant retomber mes longs cheveux et me libérant du tiraillement que cette coupe faisait subir à mon pauvre petit crâne. J'enlevais aussi les longs gants blancs, laissant à découvert mes mains abimées. Je regardais l'une d'elles. Celle qui arborait la fameuse bague de fiançaille, je me préparais à l'enlever quand la porte s'ouvrit. Mon coeur fit un bond. Je me retournais lentement... Sur le seuil de la porte se trouvait une personne assez inattendue. Ma mère. Je ne savais pas qu'elle était ici. Père lui avait interdit de me voir depuis que j'avais eu 8 ans. Elle me regarda en souriant. Dans ses yeux on pouvait voir un air de tristesse mélangé à une sorte de fierté. Son sourire n'avait jamais changé enfin d'après de ce que je pouvais me souvenir. Il était toujours aussi chaleureux. Père l'avait écarté de mon éducation et elle était retournée travailler dans un pays lointain. Loin de moi. Il avait une sacré manie de m'écarter de tous les gens que j'aimais celui là... Elle fit un pas et s'écarta de la porte. Elle tendit un bras vers la sortie et elle posa un doigt sur sa bouche.

"Je garderais le secret. Fuis ma fille."

Je répondis à son sourire tout en m'avançant vers elle. Je posais un baiser sur sa joue les larmes aux yeux. J'aimais ma mère plus que tout. Elle m'avait toujours compris et m'encourageais à faire ce que j'aime. Elle était totalement différente de Père. Le jour et la nuit... Elle prit mon visage entre ses mains et me dit tout bas.

"Je ne veux pas que tu finisses comme moi. Épouse quelqu'un qui t'aime et choisi le librement !"

Elle me lâcha et regarda Zeke. Elle baissa sa tête et la releva aussitôt. "Prends soin d'elle. Je t'en prie." Je me retournais vers Zeke et lui tendis ma main en souriant malgré les larmes qui étaient revenues...

Je me sentais si bien, auprès d'elle, ses bras enlacés autour de mon cou, sa tête contre mon torse.. Je n'avais pas connu un si pur bonheur de ma vie. Un véritable instant chargé d'amour, chargé de cet amour que je croyais perdu au plus profond de moi. Je passai mes bras autour de ses épaules et la gardai contre moi, oubliant le fait que j'étais en plein territoire 'ennemi'. Je pouvais le dire d'ailleurs, rester ici risquait ma vie. Mais peu m'importait en fait, ce moment, je ne voulais pas le briser. Je voulais qu'il dure éternellement..

Valdania se mit à pleurer contre moi.. je serrai un peu plus mes bras autour d'elle, moi aussi j'en avais envie. J'avais envie de laisser parler l'émotion qui m'étreignait la gorge et le cœur. Elle s'écarta un peu de moi, et essuya ses joues avec ses gants, effaçant alors le maquillage massacré que lui avait fait les dames de compagnie. Elle essuya la marque de rouge à lèvres je pense, sur mes lèvres, puis me caressa la joue. Je laissai apparaître un petit sourire heureux. Elle joua avec mes cheveux, noirs désormais. Je fermai les yeux, priant pour qu'elle ne demande pas d'où me venait mes quelques mèches blanches..

Elle avança, et me tourna le dos, pour arracher ce voile qui lui tenait les cheveux en chignon. Je vis sa splendide chevelure lui retomber sur les épaules, celle que j'avais aimé regarder voleter sous le claire de lune, à notre deuxième rencontre.. cette nuit où je lui avais sauvé la vie, et que nous avions passée à regarder les étoiles sur la plage, avant de regarder l'aube poindre du haut d'une falaise. Ce souvenir, qui à l'époque me pesait lourd, parce que je ne voulais pas la revoir, et que dorénavant je chérissais de tout mon être.. Elle tira doucement ses longs gants blancs, et découvrit ses mains.. si abîmées. Je ne voulais pas essayer de comprendre ce qui leur était arrivé.

La porte de la pièce s'ouvrit, mon cœur oublia de battre, mon corps tressaillit.. le dernière fois, j'ai cru mourir, cette fois ci j'allais y passer.

Une femme se présenta sur le seuil de la porte, je ne la connaissais pas, mais quelque chose me dit au fond de moi que je n'avais rien à craindre d'elle. Un visage chaleureux et doux, je commençai à comprendre.. Elle approcha de la sortie silencieusement, en portant un doigt à ses lèvres..

Valdania alla auprès d'elle et l'embrassa doucement, des larmes cristallines glissaient le long de ses joues. Sa mère lui prit le visage entre ses mains, et murmura quelques mots que je ne pus entendre. Puis en sortant, elle m'adressa un regard..

"Prends soin d'elle. Je t'en prie."

C'est tout ce que je voulais faire de ma vie. J'acquis d'un petit mouvement de tête, préférant garder le silence. Je pris la main que Valdania me tendait, et la lui caressai du pouce. Je la tirai doucement vers la porte extérieure et l'ouvrit en passant ma tête, regardant à droite et à gauche avant de l'emmener hors de cette église profanée par le prestige. Je poussai la porte avant de voir un homme..

Ce n'était pas un garde, ou même le père de Valdania.. Mais il avait une face qui ne me revenait pas, et qui ne me plaisait pas. Il me ressemblait, une sorte d'hommes à femmes et d'affaires, le sourire malin aux lèvres. Il était vêtu d'un splendide smoking, comme le mien, mais blanc, il portait une paire de gants immaculés. Sa coiffure gominée tenait ses cheveux en une raie magnifiquement dessinée sur le côté. Il me regardait, les bras croisés, comme s'il m'attendait.. Il approcha de moi avec un pas assuré et déterminé, un sourire qui se voulait chaleureux, mais qui cachait un certain amusement. Il me dévisagea, me prenant de haut comme si je n'étais qu'un inférieur par rapport à lui.

" Ainsi donc... voilà celui pour qui ma future épouse voulait dédier sa vie. Malheureusement pour toi mon ami, elle sera avec moi jusqu'à ce que la mort nous sépare. Et puis franchement, je ne vois pas ce qu'elle peut trouver en toi de si attirant. Je suis plus beau.. plus riche.. et moi j'ai un avenir. Déguerpis, avant que je n'appelle la sécurité."

Son discours me dégoûtait. Il me rappelait trop ma propre personne il y a un moment, sauf que lui ne savait pas que l'amour ne se comptait ni en Yen, ni en physique. De plus, me prendre de haut, moi, je trouvais ça impardonnable. J'avais changé certes, mais j'avais mon caractère encore un peu imbu de lui même. Je serrai le poing, puis relâchai la pression de ma main en soupirant et en fermant les yeux. Je lâchai doucement la main de Valdania.. avant d'abattre mon poing dans le visage de ce type. Il s'écroula au sol, la lèvre salement fendu et auréolée d'un joli bleu violacé. Je m'agenouillai près de lui et lui empoigna fermement le col.

" Tu n'as jamais entendu que voir la mariée avant le mariage portait malheur... Tu en es témoin maintenant. Et ne dis plus jamais de Valdania qu'elle sera ta future mariée. Elle ne t'aimera jamais, et je ne la laisserai jamais finir entre des mains telles que les tiennes."

Je lui remis son col en place, avant de passer ma main doucement dessus pour balayer la poussière et les faux plis.

" Tu as beau parler, mais tu es pire que moi. Tu ne connais pas l'empire financier des Matsuda.. Et mon avenir - je regardai Valdania et la lui montrai d'un petit mouvement de tête- c'est elle, dis-je en me relevant. Et au fait. Tu te trompes. Tu n'es vraiment pas très beau avec ta bouche enflée."

Je repris Valdania par la main et la tirai rapidement hors du jardin, avant de sourire une nouvelle fois à l'ex-futur-mari de ma compagne. C'est sûr, il allait prévenir la sécurité, il fallait filer d'ici, et vite.

Je me rendis un peu compte de ce que j'avais fait. J'avais été violent. Valdania l'avait vu, quand j'étais dans sa chambre au lycée, je lui avais décorée sa porte d'une auréole de fissures avec mon poing. Et voilà que je recommençais.. je ne me sentais pas du tout comme ça en vérité. je soupirai et ouvrit une des portières de la voiture, pour qu'elle y entre. Je fis le tour, et passai par dessus la porte de ma décapotable et démarrai. Je donnais un puissant coup d'accélérateur pour filer de là en vitesse.

" Valdania.. mon plan s'arrête ici. Je ne sais pas où pourra nous conduire cette escapade."

Je la regardai un bref instant, avant de me reconcentrer sur la route. Il fallait trouver une destination en sécurité, et vite..je regardais Valdania avec un sourire qui se voulait rassurant, mais teinté d'inquiétude et d'anxiété.

Si je l'emmenais chez moi, je me ferais vite retrouver par les hommes de son père. C'était la pire des planques possibles. Il nous aurait fallu un coin reculé en dehors de la ville, pour nous permettre d nous reposer un peu, et que je puisse rester avec elle en toute tranquillité. Je pensai alors aux endroits où elle et moi avions passé du temps ensemble, seuls.. Sa chambre du lycée, elle serait trop facile à trouver, et nos vêtements n'étaient pas assez discrets. Alors la plage. Oui, la plage, là où je doutais de ses intentions et où nous avions pu parler seul à seule dans la quiétude. Mais il faisait nuit à ce moment, cela m'étonnerait qu'elle soit déserte en cette belle journée ensoleillée. Pourtant, une fois sur l'autoroute, je pris la petite sortie qui nous y menait, après cette longue route de campagne. Je ne m'arrêtai pas à la plage non, je cherchais cette corniche sur laquelle j'avais partagé un lever de soleil avec elle. Elle était suffisamment reculé pour nous permettre de nous arrêter et parler un peu.

Une fois arrivés, je rangeai doucement la voiture sur le bas côté en soupirant, puis je descendis lui ouvrir sa portière. Le soleil était bien présent, et frappant. Je lui pris la main, et la tirai contre le mur de pierre pour nous cacher de ces rayons ardents. Je la serrai contre moi et fermai les yeux. Quel bonheur de la retrouver.

" Je te l'avais dit.. je ne t'abandonnerai jamais."

Je lui sourit, et lui fit un petit clin d'œil amusé. Nous n'étions plus en sécurité, ce rêve que j'étais efforcé de retrouver pouvait s'éteindre n'importe quand. Plus que tout au monde je voulais que cet instant dure..

Ce moment de ma vie ressemblait vraiment à un de ces contes que tout parent lit à leur enfant en manque de sommeil pour espérer qu'il rêve un peu plus ou qu'il dorme enfin... En y repensant, c'était un des plus beaux moments de ma vie.

Zeke prit ma main et me tira vers l'extérieur. Je regardais une dernière fois ma mère du coin de l'oeil et lui fis un dernier sourire, enfin un dernier, j'espérais quand même la revoir un jour... Juste après quelques pas, la potiche était déjà de retour et ce devant nous. Je lui jetai un regard noir. Il nous balançait des choses horripilantes. Cet homme n'en était même plus un. La seule chose qui l'intéressait été de grimper dans les échelons et de se montrer comme le plus puissant des Hommes sur cette terre. C'était pour cela qu'il devait m'épouser. Pour avoir la suite de la société de Père et la fusionner avec celle de son père. Peine perdue d'avance car la seule chose qui savait faire était de suivre Père et de baver sur toutes les choses qu'il touchait comme un véritable chien. J'avais eu la chance de ne pas partager sa chambre une seule fois depuis que je l'avais rencontré. Père voulait attendre que le mariage soit fait pour avoir ce qu'il voulait et ensuite me donner à ce ... Chose et encore même une chose serait plus utile.

Pendant que je rêvassais dans le flot de pensées, Zeke avait frappé mon ex-futur-mari et lui avait dis quelques mots. La moitié de son petit discourt m'avait échappé mais le principal était qu'il avait fait ce que je me retenais de faire depuis trois semaines... Il reprit ma main mais cette fois-ci avec plus de rapidité car les gardes n'allaient pas tarder. Je dus courir avec des talons aiguilles mais je fis de mon mieux pour ne pas me ramasser lamentablement par terre et nous ralentir... Arrivé à sa voiture, il ouvrit la portière et je rentrais en rapidité à l'intérieur de celle-ci. Je respirai enfin, le corset m'avait coupé le souffle nécessaire pour courir. Zeke démarra sa voiture et enfin quitter cet endroit horrible. La seule chose que je sais maintenant c'est que je ne me marierai jamais dans une église.. De toute manière, Père m'empêchera toujours de faire ce que je veux faire alors bon ... même pas la peine d'y réfléchir.

" Valdania.. mon plan s'arrête ici. Je ne sais pas où pourra nous conduire cette escapade."

Je soufflais de soulagement malgré tout. Bizarre non ? Mais mon rêve était devenu réalité. Il avait enfin pris forme devant mes yeux. Je regardais derrière moi et vis juste pendant un quart de seconde la mine affreuse de Père qui était en train de se déconfire devant tous les invités du mariage. Je me retournais et regardai la route devant nous gardant en tête cette image pathétique. Le paysage défilait à file allure. Il n'y avait pas de temps à perdre. Il était comme une ombre. On ne peut s'en détacher. Il sera toujours derrière nous ...Cela me faisait peur. Très peur. Je ne veux pas vraiment d'une vie où il faudrait fuir tous les jours pour atteindre une fausse liberté... Je secouais ma tête, pour l'instant j'étais partie de cette cage et ce grâce à Zeke. Je glissai mon regard vers lui. Son visage reflétait de l'inquiètude mais je ne dis rien le laissant se concentrer sur la route et dans ses réflexions...Il tourna sur une autre route. Ce chemin me disait quelque chose. On l'avait déjà prit. J'essayais de me souvenir... Ah oui ! La route vers la falaise, ce fameux lever de soleil...Un sourire apparut sur mes lèvres rien qu'à ce souvenir. Le temps que je me souvienne, il avait arrêté la voiture et vint ouvrir la portière. Sans aucun mot il me prit la main et me tira hors des rayons du soleil. Je le suivis sans rien dire. Zeke me serra dans ses bras. Mes petites inquiétudes disparurent soudainement, un peu comme par magie.

" Je te l'avais dit.. je ne t'abandonnerai jamais."

Je pris son visage entre mes mains et lui retournai son sourire. Cette phrase il me l'avait dit qu'une fois et ce quand il avait atterri dans la chambre par le balcon. Mais je m'en souvenais comme s'il me l'avait répété des milliers et des milliers de fois. Grâce à cette petite phrase, j'avais pu conserver le peu de "moi-même" qui me restait.

"Et le chevalier prit la main de la princesse, la délivrant enfin de ce calvaire. Celui d'être enfermée avec le plus horrible des monstres."

Une réplique venant tout droit d'un conte. Je ne sais pas pourquoi je l'avais dit mais elle rentrait bien dans le contexte, non ? Je me levais légèrement et posais un baiser sur sa joue puis sur le coin de ses lèvres puis sur elles. Je lui murmurais "Merci de m'avoir sorti de là." .... Me détachant de lui, je me posais contre le mur prenant un peu d'écart sur les choses. Me coupant des illusions que tout allait bien. Cela me paraissait encore un peu bizarre de pouvoir l'embrasser comme ça mais il n'y avait pas que ça. J'avais encore peur du pouvoir de Père. Grâce à ses nombreux contacts il pouvait nous retrouver comme il veut, quand il veut. Je suis sûre qu'il avait même des contacts qui s'occupaient de satellites militaires ou autres... Je délirais surement mais peut-être qu'il le fallait... Je posais mes mains sur son torse, essayant de calmer mes peurs.

On est pas sorti des problèmes pour autant non ?

Je fis une pause. Oui je cassais l'ambiance des retrouvailles mais il fallait y penser malgré tout. On était tous les deux bien loin de l'insouciance des fugues de jeunes ados, même si on était encore un peu dedans... Ma tension et ma respiration augmentaient rien qu'au fait de penser au mal qu'il pourrait lui faire s'il nous retrouvait. Moi, ce n'était pas grave j'y étais habituée...Mais pour lui cela ne se passera pas pareil.

"Il ne va pas nous laisser nous enfuir sans rien dire et faire que regarder... Zeke. On va pas pouvoir fuir comme ça bien longtemps. Il faut qu'on trouve un moyen qui puisse régler tout ça. Sinon on va faire que nous cacher et ce pendant des années, car il ne va rien lâcher."

J'avançais un peu vers les rayons et regardais l'horizon m'accrochant au coin du mur. Je commençais à avoir du mal à respirer et le souffle court. Entre deux, je me laissais tomber à genoux pour essayer de mieux respirer, essayer de prendre plus d'air. Père voulait me tuer avec une robe comme ça. Quelle idée de me mettre un corset. On était plus à la Renaissance où les femmes les mettaient pour avoir une poitrine pigeonnante et user de leur charme pour avoir un peu de liberté. Il fallait que je l'enlève. Cela n'était pas grave si je devais me retrouver à poil .. Je m'en foutais carrément, la seule chose que je voulais c'était d'enlever cette souffrance qui m'empêchait de respirer à pleins poumons... Ce corset ressemblait à une cage, celle que Père m'avait choisi. Je me retournais vers Zeke, je le voyais flou. Il fallait que je me calme. Je lui pris la main.

S'il te plait, aide .. moi. Je repris mon souffle. En-core une ... fois.

Valdania se sépara doucement de moi, pour s'appuyer tout près sur le mur. Je sentais qu'elle aussi, elle savait que tout n'était pas fini. Elle et moi aurions encore bien des épreuves à franchir avant d'être ensemble pour toujours. Je la laissai faire sans rien dire, profitant pour prendre une cigarette de mon paquet, tout en fixant les rayons ardents et doux du soleil surplombant la mer. Il lui offrait mille reflets scintillants, commun, mais d'une beauté naturelle outrageante. Ça m'apaisait, à l'inverse de la pluie battant inlassablement sur ma fenêtre.

Elle avait raison. Elle avait bien trop raison, j'en soupirai. Je devais encore me battre pour l'avoir, je n'avais fait que retarder l'échéance, tôt ou tard il me faudrait affronter son père de nouveau. J'en avais des frissons qui me mordaient la nuque.

Je le savais, mais je priai pour que le moment où il nous retrouve ne soit pas trop court.. Je voulais être sûr de pouvoir l'affronter, mais quand j'y pensais, et repensai à la dernière fois où il avait croisé mon regard, je me sentais incroyablement faible. Bien trop pour lui.. Je baissai la tête, mes yeux fermés cachés par mes lunettes de soleil que j'avais replacé sur mon nez. Je soufflai un nuage de fumée et le regardai. J'avais peur qu'il ne ressemble de trop près à notre futur..

Valdania avança un peu, et s'appuya contre le mur pour regarder l'horizon. je ne bougeais pas, je réfléchissais dans mon coin, perdu dans l'imagination d'une parade ultime au prochain assaut du père Hadlandra. Elle se laissa tomber sur ses genoux, ça attira mon attention. Elle tentait de se défaire une fois pour toutes de son corset. Je savais très clairement comment elle serai sans, mais je ne voulais pas lui ôter ce plaisir de mettre fin à son entrave. Mais elle tourna la tête avec un air las, et me prit la main.. J'entendais une irrégularité dans sa voix, dans sa respiration. Je posai un genou au sol vers elle, pui posai une main sur son dos.

Je compris de suite ce que j'avais à faire. Je pris les clés de mon appartement dans ma poche, et m'en servis pour desserrer le corset, et le lui enlever. Je retirai ensuite ma veste et la passai doucement autour de ses épaules. Je posai le corset par terre et la regardai avec un petit sourire..

"Ça va mieux, dis-je, avant de marquer un petit temps d'arrêt. Viens. J'ai une idée. Il y a un hôtel où mon père bénéficie une chambre réservée d'office. On pourra s'y reposer un ou deux jours. Il n'est pas très connu, mais bien gardé."

Je l'aidai à se relever doucement, et à monter dans la voiture. Cet hôtel semblait être un bon point de chute. Il n'apparaissait dans aucun des registres bancaires de Père, et était reculé par rapport à la ville. Bien sûr, on ne pourrait pas y rester longtemps, mais au moins le temps que je monte un plan efficace pour me défaire de ce diable.

La route ne serait pas longue.. Si je n'avais pas tant de pensées bloquant mon esprit...

Nous arrivâmes dans un petit Ryokan de luxe, un véritable hôtel de détente, dépourvu des nuisances sonores de la ville, au cœur de la nature.. un petit paradis sur terre. J'y entrai, accompagné de Valdania, puis déclarai le nom de mon père sur le registre d'accueil. J'en obtins un sourire et les clés de la chambre, et un bon séjour enjoué. J'en ris doucement.

Je gravis les marches du premier et unique étage sans lui lâcher la main. Je m'étais toujours servi de cet chambre autrement que comme une cachette à l'abri des regards ... J'avançai vers la porte et y entrai la clé, avant de faire un tour de serrure..bloqué. Comme si la porte était déjà ouverte. Mon coeur sauta et mon corps entier tressaillit. Je poussai la porte en respirant calmement, pour découvrir une chambre plongée dans l'obscurité, un simple point rougeoyant scintillant à travers les ténèbres. Je tandis mon bras à tâtons, en serrant ma main sur celle de Valdania, et allumai la lumière avec le petit interrupteur..

Stupéfaction, étonnement..incompréhension. Tous trois me serraient et me nouaient la gorge, à un tel point que je ne respirai presque plus. Cet homme qui m'attendait dans ma chambre n'était autre que mon père. Mon propre père. Il avait eu un tour d'avance, comme d'habitude me concernant, la simple fait qu'il puisse prévoir ce que je ferais m'était formidable. Il me connaissait si bien... Je lâchai instinctivement la main de Valdania et approchai de lui, avant d'incliner doucement la tête vers lui.

"Père.."

Cet homme me ressemblait, avec une bonne vingtaine d'années en plus. Ses cheveux étaient d'un noir de jais, tout comme les miens actuellement, et son style à la fois chic mais décontracté, formaient une sorte de miroir de jouvence entre lui et moi. j'avais ses traits, sa carrure, son visage.. et les yeux gris de ma mère. J'avais l'impression de n'être qu'une sorte d'imitation de lui, je lui devais ma personne et je lui en retournais un grand respect.

" Tu as fait quelque chose d'impardonnable, Zeke. Tu ne te rends sûrement pas compte de la gravité de ce que tu viens de faire."

Je levai la tête, en ayant un regard assuré et insolent. Il osait me dire ça, alors que lui ne savait rien de ce qui s'était produit en moi.

" Père vous ne..

- Silence, dit-il en tirant sur sa cigarette. Franchement, fils, tu me ressembles trop.

- P..Pardon ?"

Il me sourit. Nobuhiro Matsuda ne m'en avait pas fait depuis si longtemps.. Depuis près de 2 ans en fait.

" Je savais que tu viendrais ici.

- Comment avez-vous su ?

- Je te connais très bien. Depuis le jour où tu m'as volé ma Jaguar pour une course, il tira encore sur sa cigarette. Et puis on me prévient à chaque fois que tu viens ici.

- Je vois. Qu'avez-vous décidé nous concernant ?

- Ça c'est à toi de voir. Entre lui... et toi. Cependant... je ne manquerai pas d'y mettre mon grain de sel. Tu devrais aller le voir. Tu pourras t'en sortir.

- Y aller.. serait comme mettre les pieds en enfer.

- Fils.. L'enfer et le Paradis sont sur Terre. Tout dépend du chemin que tu choisiras de prendre.

- De quel vieil adage tirez-vous cela", demandai-je en souriant.

Il s'approcha de moi et me tapota l'épaule, toujours en souriant.

" Elizabeth Hurley, dans Endiablé, voyons."

Puis il sortit de la chambre, en souriant pour Valdania, un sourire que je vis franc, et disant à haute voix "bon courage". Je ne pus que rire. La dernière fois que je l'avais vu, c'était parce que j'avais froissé la tôle de sa voiture contre une autre en pleine course. La rencontre n'avait pas été joyeuse.

Je me laissai tomber sur mon lit, le visage entre les mains, mais tout en souriant. J'avais trouvé, au fond de ses paroles, le peu de courage qu'il me manquait pour y arriver. Ce n'était pas un problème de force, mais bien de bravoure, et au fond de moi, j'entendais encore mon père, me disant que je pourrais y arriver. J'avais son soutien, le sentiment que ça me procurait été fort, je me sentais imbattable..

"Valdania... Il a raison."

Zeke me libéra une nouvelle fois de l'emprise de mon père qui était indirecte mais bien présente et étouffante ...C'était le cas de le dire d'ailleurs. Il glissa sur mes épaules nues sa veste. Je respirai enfin à pleins poumons. Je glissais mes bras dans les manches et attachais deux boutons pour ne pas me promener à poils...Un minimum quand même, faut pas croire je suis pudique et bien élevée ! Je répondis à son sourire et le remerciais avec un semblant de gêne dans la voix.

"Ça va mieux, dis-je, avant de marquer un petit temps d'arrêt. Viens. J'ai une idée. Il y a un hôtel où mon père bénéficie une chambre réservée d'office. On pourra s'y reposer un ou deux jours. Il n'est pas très connu, mais bien gardé."

Ne répondant que par un signe bref de la tête mais qui voulait tout dire, je le suivais sans un mot, ce que je faisais très souvent en ce moment. Enfin bref, ce n'était pas très important car il faisait exactement ce que j'aurais fait ... Bizarre dit comme ça, non ?
Passons.
Le calme était toujours omniprésent dans la voiture, je pense que nous étions tous deux perdus dans nos pensées. Ce que l'on allait devenir était incertain à partir de maintenant.

La seule chose que je savais et qui était sur, était ce que j'allais subir si mon père rappliquait devant nous avec derrière lui une armée d'homme en noir. Je ne voyais que ça quand je traçais notre avenir, il n'y avait aucun autre débouché. Pensées obscurs direz-vous, mais ces pensées étaient fondées sur l'expérience et ce que je savais de Père. Mon coeur se serra dans ma poitrine.... Il fallait que je sois plus positive que ça !! Allez Valdi tu peux le faire, souris et dis toi qu'il n'y aura pas de problème. Ce n'est pas si grave que ça d'avoir fuis ton "mariage", que l'homme que tu aimes ait aplati celui que tu devais épouser et que Père se soit fait ridiculiser devant la plupart des personnes présentes. Mon dieu... Je m'enfouis un peu plus dans le siège, espérant peut-être fusionner avec lui et disparaitre totalement de la surface de la planète... Ce n'était pas grave... C'était juste, comment dire, la m****.

Après ces maintes pensées, je ne remarquais même pas que nous étions arrivés au ryokan. Je le suivais encore une fois sans rien dire essayant juste de bien tenir la veste pour ne pas m'exibisionner devant le peu de gens qui se trouvaient dans l'hôtel. Il parla quelques instants au réceptionniste qui d'ailleurs me regardait avec un sourire enjoueur ou malin je ne sais pas trop mais rien qu'à ça je compris que la réputation de Zeke y était pour quelque chose. Aux yeux de cet homme j'étais une parmis tant d'autre...C'est ce que j'aurais cru aussi à sa place.

Zeke se crispa devant la porte de la chambre... Je ne compris pas trop ce que se passait mais je ne prononçais toujours pas un mot. Je respectais son silence. Il alluma la lumière et à mon grand étonnement son père était là. Comment réagir ? ... Je pense que reculer de deux pas suffira. Zeke entra en conversation avec lui et moi je restai en arrière les écoutant comme un pot de fleur ou une potiche. Je sais pas trop pourquoi mais depuis que j'avais pu, et ce plusieurs fois, m'échapper des griffes de Père, mon caractère changeait petit à petit. Peut-être que j'avais inconsciemment compris qu'il n'était pas aussi inébranlable ou "parfait" qu'il le montrait. Bref, tous ça pour dire que le fait de ne jamais rien faire comme ces princesses qui attendent dans leur tour ou dans un sommeil profond que leur prince vient les sauver, tout cela m'insupporter et commençait à me taper sur les nerfs.

Zeke ressemblait comme deux gouttes d'eau à son père, ils avaient les mêmes attitudes et expressions, c'était assez troublant. Son père lui conseilla d'aller parlementer avec le mien..Aie aie aie. Il sortit tel un artiste ayant fini sa performance en me souriant et ferma la porte derrière moi. Son fils par contre s'étala sur le lit. Il avait l'air léger comme si son père lui avait enlever un poids et comme s'il avait trouvé enfin le moyen de se relever devant Père.

"Valdania... Il a raison."

J'avançais jusqu'à lui et m'asseyais au bord du lit.

"Hm... Je sais. Malheuresement il faut y arriver maintenant et ça c'est autre chose... Je tombe dans pessimisme total là..."

Je me tus avant de dire une autre connerie qui pourrait enlever la force qu'il venait de trouver. Je me laissais tomber à côté de lui. Cela faisait un moment que je n'avais pas sentis cette sensation de sécurité et d'un endroit chaleureux. Je me laissais le droit de l'embraser puis de poser ma tête sur son torse pour calmer mes angoisses débiles avec le son de ses battements de coeur. J'étais sure qu'il ne me dirait rien pour ça, après tout cela faisait un moment qu'on ne s'était pas vu tous les deux dans un silence complet et sur un territoire "protégé".

".. on peut y arriver. Mon père n'est pas si patient pour nous pourchasser dans le monde entier... On peut arriver à le convaincre."

Le stress de la poursuite était tombé et on était enfin dans un calme qu'on avait espéré depuis un bon moment. Je fermais les yeux accompagné de sa chaleur qui m'entourait tout doucement...Mais une pensée me traversa l'esprit et je me relevais rapidement du lit ayant une envie soudaine de visiter la chambre. Et oui elles sont grandes les suites, y'a de quoi découvrir. Je lui tournais le dos pour cacher mes joues empourprées et avançais un peu dans celle-ci. Tiens un salon à la japonaise dans le coin, je ne l'avais pas vu. J'étais toujours dans son champs de vision mais bon plus loin j'étais et moins il entendrait mon coeur battant à tout rompre. Mais quelle idée, j'avais envie de taper ma tête contre un mur. Pourquoi j'avais pensé à ce genre de choses ... Je n'avais pas honte vu que c'est normal mais voilà quoi... Une autre pensée me traversa l'esprit mais celle-ci j'étais capable de la formuler à l'oral, bon avec ma gêne restante mais ça essayons de le faire passer sous silence.

"Dis....hem je crois qu'on.... devrait aller s'acheter des vétements parce que tu vois... une jupe et une veste où on voit presque tout c'est pas discret du tout."

"Hm... Je sais. Malheuresement il faut y arriver maintenant et ça c'est autre chose... Je tombe dans pessimisme total là..."

Ce qu'elle dit me fit sourire de nouveau. Je sentais qu'au fond d'elle elle le craignait, et bien plus que moi. Si elle avait peur, je serais là pour la rassurer, et je ne la laisserai pas filer entre mes doigts. Je donnerai tout pour n'avoir que son sourire, un vrai, gratuit, comme ceux des couples normaux qui vont pique-niquer dans un parc. Je m'étais rendu compte que jusqu'à maintenant, nous n'étions jamais vraiment sortis ensemble. Jamais nous n'avions eu un rendez-vous normal.

Valdania s'assit au bord du lit, avant de venir m'embrasser. J'aime tant sa douceur.. Elle posa sa tête avec délicatesse sur mon torse, et je commençai à caresser ses cheveux. C'était bien la seule fille que je pouvais garder contre moi de cette manière. Toutes celles que j'avais accompagnées dans cette chambre avaient été dénudées dans un laps de temps bien plus court -bien sûr, j'euphémise, et je le précise car Valdania l'est en quelque sorte- et la nuit ne semblait pas si calme.

".. on peut y arriver. Mon père n'est pas si patient pour nous pourchasser dans le monde entier... On peut arriver à le convaincre."

C'est exactement ce que je ferai, je me répétais cette phrase dans ma tête, tout en cherchant la meilleure solution pour y arriver. Peut-être.. essayer de marchander de nouveau ? Cette idée me déplaisait toujours. Même si je ne pense pas que jouer la carte des sentiments n'obtienne guère de succès.

Alors que je me noyais dans les réflexions, Valdania se leva. D'un geste soudain, elle commença à visiter la chambre. J'en profitai pour me rassoir au bord du lit, posant mes coudes sur mes genoux. J'appuyai la pointe de mon menton sur mes mains jointes, et repartis dans l'élaboration d'un plan. Mais de nouveau, elle m'en tira.

"Dis....hem je crois qu'on.... devrait aller s'acheter des vêtements parce que tu vois... une jupe et une veste où on voit presque tout c'est pas discret du tout."

C'est vrai. Je souris.

"Emprunter les kimonos du Ryôkan ne serait pas plus discret pour autant. En attendant ils te metteront un peu plus à l'aise."

Je commençai à fouiller dans mes poches. Mince, mes cigarettes et mon briquet se trouvent dans la poche intérieure de ma veste. Que Valdania porte.

Je me levai, et approchai d'elle. J'approchai doucement de son dos, puis je passai mes bras autour de sa taille. D'une main, je saisis un pan de la veste, tandis que l'autre gravissait doucement la peau du corps de Valdania, pour aller se nicher dans la poche qui se trouvait à hauteur du cœur. Je pris ce que je recherchai, et lui souris.

"Merci. Les seuls magasins de vêtements du coin sont fermés pour ce soir. Je te propose d'y aller demain après une nuit de repos, d'accord ?"

Je me dirigeai vers le balcon, surplombant le jardin traditionnel de l'hôtel, en allumant la cigarette. Je savais que le tabac ne lui plaisait pas, je voulais lui épargner son odeur à l'intérieur de la chambre, en dépit de la fraicheur extérieure. Je regardais le bassin aménagé, sur lequel était juché un petit pont. Quelques globes lumineux éclairaient fébrilement l'endroit, quelques lucioles voletaient au dessus de l'eau. L'endroit avait son petit côté fabuleux en cette époque de l'année.

Je m'appuyai sur les coudes, la cigarette entre le pouce et le majeur, observant avec délectation ce petit bout de paradis juste en dessous de moi.

Je continuais de regarder autour de moi, essayant d'oublier ma gêne. Zeke me répondit que les magasins du coin étaient tous fermés pour la nuit... Normal. Pour l'idée de prendre les kimonos de l'hôtel, j'étais pour. Je ne me sentais pas très à l'aise avec juste une jupe sur moi et la veste de Zeke.

Je portais les manches plus longues que mes bras vers mon visage, le cachant partiellement. Son odeur m'enveloppait, je me sentais protégée et en sécurité. Je ne l'entendis pas arriver derrière moi. Il glissa ses bras autour de ma taille....Heu... Mon visage s'empourpra. Une de ses mains glissa vers la poche intérieure de sa veste. Rien que le fait qu'il me touche faisait battre mon coeur à une vitesse indescriptible. Cela me rappelait un peu la première fois que je l'avais vu. Je pense qu'il m'avait attiré dès que j'ai posé mon regard dans le sien. Il y avait certaines choses dans son passé qui ressemblaient au mien. Son air froid cachait sous une épaisse carapace un coeur chaleureux. Je pense que je m'étais lancée, seule, le défi de voir ce coeur. S'il n'avait pas été comme ça. Je pense que je serais mariée à l'heure qu'il est.

Je repris mes esprits. Rien que par son contact, j'étais partie ailleurs. Lui, pendant ce temps, avait récupéré sa cigarette et son briquet pour aller fumer dehors. J'avais eu, pendant quelques secondes, peur enfin je ne sais pas si c'était de la peur. En plus, on était seul... Bon OK c'est comme ça que je l'ai rencontré, mais quand même.. STOP. Penses à autre chose, Valdi. J'avançais un peu vers le balcon mais sans me faire voir. Un calme régnait sur le ryokan. Qui sait combien de temps cela durera ? Mais je n'avais pas envie de tout gâcher. J'avais décidé d'être positive et la visite de son père m'avait un peu aidé dans cette décision.

Zeke avait l'air serein. S'appuyant tranquillement contre la barrière. Je souris en silence. Quel frimeur. Je pensais ça mais en fait, j'étais un peu comme éblouie. Cela ne vous est-il jamais arrivé de regarder quelqu'un et de penser qu'il éclairait un peu votre vie ? Que sans lui, la vie serait noire et blanche, mais rien que sa présence fait apparaître un champ de couleurs. Je me dis qu'il valait mieux le laisser un peu tranquille et aller me laver, cela m'aiderait à me détendre de la journée... Non des trois semaines que j'avais passés dans ma famille de fou.

Posant mes mains sur les carreaux gelés de la douche, je laissais couler l'eau chaude sur mon visage. Je regardais mes mains. Elles avaient un peu guéri mais on pouvait voir encore les marques où mes ongles avaient forcé ma peau. Mais ce n'était pas ça qui avait attiré mon attention. Autour de mon doigt se trouvait la bague de fiançailles que Père m'avait forcé à porter. J'avais oublié de la jeter à la face de la potiche ! Mince ! Je fermais le robinet et sortis de la douche. Je repérais rapidement le kimono à côté du lavabo et l'enfilais. C'est vrai que c'était plus agréable que le corset. Ma douche avait été rapide. Le même temps qu'une cigarette. Essuyant mes cheveux avec une serviette je sortis sur le balcon. Je posais mon dos contre la barrière et me retrouvait donc face à Zeke. Je laissais la serviette sur mon épaule, les cheveux toujours mouillés, goûtaient sur le kimono. Je regardais le bague briller sous la lune. Si elle n'avait pas été de mon père, je crois que je l'aurais bien aimé. Je l'enlevais et commençais à jouer avec celle-ci.

"Bizarrement, je ne sais pas quoi te dire. C'est vrai. On a jamais vraiment parlé tous les deux. Enfin, jamais de choses banales ou encore de nos petits trucs du quotidien. En fait la seule chose qu'on est fait, c'est de nous prendre la tête. Enfin c'était un peu ma faute, je t'ai un peu poussé à le faire."

Je m'arrêtais un petit moment en souriant et faisant glisser la bague dans un autre
doigt.

"Quel couple bizarre ..."

J'enlevais la bague.

" Il faudrait peut-être que je la jette non ? On sait jamais, mon père aurait été capable de mettre un traceur sophistiqué à l'intérieur pour pouvoir me suivre de partout où je peux me rendre avec un autre..."

Je la posais dans la paume de ma main droite. J'allais pour la jeter mais quelque chose me retenait. Je venais de penser que c'était mon père... Jeter la bague serait définitivement couper tous ponts avec lui. Cela me faisait un peu peur. J'avais beau le détester c'était mon père, rien ne pouvait changer ce fait.
Je sautais sur la barrière pour m'asseoir. Fermant mon poing, je l'emmenais vers mes lèvres. L'emprise de père était toujours là. Ce n'était pas fini, mais cela allait peut-être finir si je la jetais. Je levais mon poings au-dessus de ma tête. J'étais de dos au jardin car je ne voulais pas voir où elle allait atterir. Car je pourrais certainement retourner la chercher
[...]
Je n'arrivais pas à la jeter. De ma main gauche, je pris la main de Zeke, j'avais peur, je ne savais pas de quoi mais je savais que c'était de la peur.

Faire s'évader mes pensées, penser à autre chose, regarder le monde d'un autre façon. Tranquillement appuyé sur le balcon, je regardais le jardin, qui me faisait flotter dans une rêvasserie enivrante. Je grinçai des dents. Ce n'était que calme avant la tempête. Peut-être.. pourrions nous nous cacher ici une nuit encore, je ne sais pas. Mais je voulais, plus que tout au monde rester dans cette situation avec elle. Sans pression. Sans fuite. Sans stress. Non, le stress me prend à la gorge, là. Qui sait si on est en sécurité, si on n'est pas surveillé, ou traqués. Je soupirai longuement. Ce n'est pas mon genre de penser négativement. En fait.. j'ai tellement changé. Il y a encore quelques mois, je n'aurais pas pris cette chambre pour me cacher, ou me reposer. Je n'aurais pas glissé mes bras autour d'elle, sans aller plus loin. Je n'aurais pas passé du temps à flâner sur ce balcon, je serais en boîte, ou dans un bar. Je n'aurais pas pu rester autant au calme. Mais c'est parce qu'elle était là.

Où d'ailleurs ? J'écrasai ma cigarette sur le cendrier de la table de bois du balcon, et jetai un petit coup d'oeil dans l'appartement. Personne. Où était-elle passée ? J'entendis la douche. Sûrement un instant de relaxation. Tant mieux, ça nous fera du bien. J'y passerai quand elle aura fini. J'ouvris ma chemise, jusqu'à l'abdomen, laissant mon corps respirer l'air frais de cette soirée.

Valdania apparut sur le balcon, et vint s'adosser presque face à moi, sur la rambarde. Je ne sais pas. Ma pensée ne s'enchaîna pas, pour me diriger vers la salle de bain. Je restai là, devant elle, à la regarder. Elle semblait.. intriguée par sa main. Non. La bague de fiançailles. Elle la détaillait, avant de l'ôter, et de la balader entre ses doigts.

"Bizarrement, je ne sais pas quoi te dire. C'est vrai. On a jamais vraiment parlé tous les deux. Enfin, jamais de choses banales ou encore de nos petits trucs du quotidien. En fait la seule chose qu'on est fait, c'est de nous prendre la tête. Enfin c'était un peu ma faute, je t'ai un peu poussé à le faire."

Je ne pus que baisser les yeux. C'est comme je le pensais. Nous n'étions pas normaux. Même si mon amour pour elle est assez fort pour l'attendre, et la kidnapper la veille de son mariage, moi, serais-je capable de tenir une relation normale.. après tout ça ? Serais-je suffisamment fort pour la garder près de moi ? Suis-je une bonne personne.. je me rendis compte... qu'au fond je ne savais plus qui j'étais.

Elle continuait de jouer avec la bague, l'enfila dans un autre doigt.

"Quel couple bizarre ..."

S'il te plait ne dis pas ça.. je le sais, je ne le sais que trop bien. C'est peut-être ma faute si on en est là... Si je n'avais pas tout fait pour te faire tomber amoureuse. Si je n'avais pas presque perdu raison dans mon appartement, si je n'avais pas bravé la mort et la souffrance pour toi. Sommes nous tellement plus heureux ensemble que séparés ? Moi je le crois, ne me fait pas douter de moi maintenant.

" Il faudrait peut-être que je la jette non ? On sait jamais, mon père aurait été capable de mettre un traceur sophistiqué à l'intérieur pour pouvoir me suivre de partout où je peux me rendre avec un autre..."

J'eus un petit rictus. Sa remarque m'ôtait ces noires pensées de l'esprit, et m'amusa. Mettre un traceur dans une bague de fiançailles. Il ne travaille pas pour la DGSE non plus. Du moins j'espère.

Valdania hésitait à le faire. Sa main ne lâchait pas la bague. Elle se rassit sur la barrière, avant d'embrasser doucement le bijou. Elle y tenait encore. Elle ne voulait pas perdre son père... C'est honorable. Même en étant une belle ordure, il reste son père. Je ne savais pas quoi lui dire sur le moment.

Faisait-elle bien. Agissait-elle par désespoir. Que se passait-il en elle, son esprit était-il tourmenté.

Elle me prit doucement la main, fébrilement. Je me mis bien face à elle, et la serrai contre moi, lui caressant la tête, respirant le parfum de ses cheveux encore humides. Le silence prit encore le dessus, mais doucement. Ce n'était pas ce silence de gêne que nous connaissions si bien elle et moi, plutôt ce silence calme et doux qui accompagne une soirée d'été tranquille. Je lui relevai le menton doucement, et la regardai en souriant.

"Range cette bague. Garde là. Nous la lui rendrons en temps voulu. Et puis, si elle contient un traceur, la jeter dans le jardin en servirait à rien, nous sommes dans l'enceinte de l'hôtel après tout. Et elle doit coûter cher de surcroit, ce serait un gaspillage énorme."

Je lui souris chaudement, avant de l'embrasser. Je voulais ce moment. Je voulais qu'on passe ce moment ensemble sans se soucier de rien, mais c'était difficile. Il fallait que je trouve une idée, et rapidement.

"Dis, tu n'as pas faim ? Et si on commandait quelque chose, et on se le fait livrer ici. Pas de repas haut de gamme, juste un truc simple. Une pizza, un chinois... des sushis ?"

Au moins ma blague avait fait rire Zeke et avait changé l'atmosphère, enfin surtout pour lui car pour moi l'hésitation était encore là. La bague m'intriguait toujours, je ne savais pas quoi en faire. J'étais si faible, toujours à me plaindre, toujours à être protégée par les autres, je ne savais rien faire par moi-même. Même là, Zeke qui m'entourait de ses bras me réconfortait par sa chaleur mais aussi par les battements de son coeur. Il me conseillait, me guidait... Une sorte de révolution intérieur se créait. Essayer de changer !

"Range cette bague. Garde là. Nous la lui rendrons en temps voulu. Et puis, si elle contient un traceur, la jeter dans le jardin en servirait à rien, nous sommes dans l'enceinte de l'hôtel après tout. Et elle doit coûter cher de surcroit, ce serait un gaspillage énorme."

"Hm..Ok. Si tu le dis ..."

J'acquesçiais aussi d'un hochement de tête. Zeke s'écarta de moi me sourit et m'embrassa. Il m'avait calmé et cela en quelques secondes. Un sourire se dessina sur mes lèvres rien qu'à cette pensée. Il était doué. Il proposa de manger quelque chose.

"Bonne idée, j'ai pas mangé depuis ce matin, je n'avais même pas remarqué... Faut dire il y a eu de l'agitation. Je dirais .... Une pizza, n'importe quoi j'aime tout..Puis je crois qu'on point où j'en suis je mangerais tout."

Je souris de nouveau. J'avais dit que je "positiverais" pourtant je n'ai pas tenu à mes paroles autant le faire maintenant et pour Zeke. Je vis Zeke partir pour téléphoner, moi, je restais sur le balcon me tournant vers le jardin. Il était vraiment magnifique ce Ryokan... Il faut dire aussi que j'adorais l'histoire du Japon et leur culture. La culture occidentale j'en avais déjà fait le tour et puis cette culture se perdait alors que les Japonais comme les Coréens gardaient précieusement leur culture.
Je m'essuyais bien les cheveux et posais la serviette sur la barrière du balcon. Je rentrais dans la chambre, Zeke avait fini de téléphoner. Je m'asseyais sur le premier fauteuil qui venait à ma portée gardant un visage souriant limite rayonnant.

"Dis comment un jour je pourrais te rendre la pareille. Pour ce que tu as fait avant que je parte en France et même maintenant ?"

Je le regardais quelques instants puis je rajoutais.

"Hm.. Enfin un jour si tu as une idée dis le moi. Je n'en peux plus de faire que regarder."

Mon sourire n'était toujours pas parti, je disais ça pour qu'il n'y ai pas de silence et surtout car je voulais me rendre utile. Et oui il était temps de changer un peu car je crois que je devrais faire face à mon père dans un futur proche et cela risque de m'être difficile si je ne faisais pas un effort. Mon niveau était aussi inutile que la potiche que Zeke avait frappé à l'église. Son nom ne mérite même pas d'être cité dans mon histoire... Je me levais du fauteuil, tournais Zeke vers la salle de bain et le poussais.

"Allez oublie et va te laver, tu verras on se sent mieux après une bonne douche surtout après une journée aussi dure."

Une fois qu'il était enfin dans la salle de bain, j'enlevais mes mains de son dos et en posais une sur la poignet de la porte.

"Tu sais,ça me fait toujours aussi bizarre de te voir avec les cheveux noirs... Bref bonne douche, on encore le temps avant que le livreur arrive non ?"

Je lui fis un signe de la main et fermais la porte avec un petit rire. Parler pour rien dire... Une habitude par Valdi. Je me reconnaissais tout doucement. Mon moi revient. Alala je l'accueillais avec plaisir. Me tournant vers la chambre je commençais à chantonner. Je m'assis sur le fauteuil que j'avais quitté plutôt, les genoux repliés sur mon corps et ma tête posée sur le dossier de celui-ci pour regarder la lune. Le calme était revenu. Et si je m'endormais ... Je fais confiance à Zeke il me réveillera si je m'endors.

"Oui je le sais... "

» Sweet Escape... Second Chapter [PV: Valdania]
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