Changement de programme [ PV : Sunny ]

Aujourd’hui lundi, il fait beau sur Nagoya. Le temps est dégagé, le soleil radieux tout va bien sur cette infime partie du monde. Deux millions d’humains –puisque c’est le nombre d’habitants de la ville – seront contents de travailler, d’aller à l’école ou de faire toute autre chose par un temps pareil. Bien qu’il n’aime pas spécialement le lundi, et pour causes tous ses lundis jusque là commençaient par des cours obligatoires qu’il n’encaissait pas, Shuya aimait celui-ci. Au diable l’anglais dès huit heures, les maths et pire encore l’éducation sexuelle, pas très idéal pour débuter une journée. Bonjour le plaisir et la détente en ce jour. Par une absence de cours ce lundi, Nanahara décida de faire une virée en ville afin de trouver et repérer une boutique de sports extrêmes où il pourrait revenir à ses nombreuses heures perdues. Cette balade et journée, il la passa sans son amie Akane qui resta clouée au lit à cause d’une fièvre de cheval. En bon copain, il aurait aimé passer du temps en sa compagnie dans cette immense ruche d’immeubles qu’est Nagoya. Être à deux pour évoluer en pareil endroit n’est pas de refus, c’est presque indispensable. Enfin bref, l’idéal pour trouver ce genre de boutiques est d’aller au centre ville, dans les rues piétonnes une telle enseigne doit exister ce n’est pas possible autrement. Le meilleur moyen de se rendre au centre ville est de prendre le métro de la station non loin du lycée jusqu’à un arrêt au cœur d’un des quartiers les plus fréquentés. C’est ce qu’il fit donc, le trajet en métro ne fut pas une grande aventure. La banalité de ce moyen de transport, ses eusses et coutumes ne l’inspirait même plus. Il savait quoi faire pour ne pas être repéré par une petite frappe soucieuse de vous dépouiller de vos biens ce sans votre consentement. Faire profil bas, se la jouer cool et tout irait bien. En gros, ne pas s’exposer. Planche à la main, le lycéen paraissait être un gamin tout à fait normal se rendant en ville pour slider sur quelques bancs du parc. En réalité non, mais ça personne ne le savait …

Enfin bref, au bout de dix minutes de ligne, Nanahara arriva enfin en ville. Nagoya la grande était assez incroyable. Même si depuis que sa famille avait emménagée ici l’an dernier, il avait eu l’occasion de venir régulièrement en cet endroit, Shuya conservait cette pointe d’émotion en voyant la magnificence des hauts le ciel. Il ne s’attarda pas sur le paysage aux multiples couleurs avec les immenses panneaux publicitaires accrochés sur la façade des immeubles, passant ainsi son chemin. En quelques pas, il arriva dans le quartier piéton où sa quête du magasin idéal commença. Nombreuses sont les boutiques dans cet endroit, diverses et variées d’ailleurs. Au bout d’un long moment, il commença à désespérer de voir tant de monde dans cette rue, et aussi mais surtout de ne pas trouver la perle rare. Quand tout à coup, Shuya s’immobilisa net. La boutique était là, à quelques mètres de lui, enfin à portée. Il brava la foule pour s’en approcher et observer la vitrine qui présentait tout un tas de planches et d’objets divers allant des coudières aux casques. Il bouscula plusieurs personnes au passage, se fit bousculé et manqua de faire tomber quelqu’un dans le dernier mètre de sa course. Il rattrapa la personne par le poignet, de justesse… « Désolé je n’ai pas fait attention à où je marchais… »

Nanahara peut en clin à s’adresser à des inconnus, sauf quand il n’a pas le choix, essaye quand il se retrouve dans la rue de ne parler à personne autant qu’il lui soit possible de le faire. Les gens, ce n’est pas vraiment sa passion. Bon parler avec eux tout ça, pas de problèmes mais il y a des endroits pour. Commencer à accoster quelqu’un sans le prévenir en pleine rue, n’était pas son délire. Seulement là, il fut victime d’une rencontre forcée pour ainsi dire. Shuya se frayait un chemin non pas à travers champs, mais à travers la foule. Dans le quartier central de Nagoya, muait une masse compacte de personnes aussi diverses que variées. Des jeunes, des vieux, des chômeurs, des travailleurs… Bref de tout. Même une apprentie prof d’anglais tien ! C’était d’ailleurs dans cette jeune femme, désireuse de devenir titulaire en la matière, que le lycée manqua de faire tomber à la renverse. Il la rattrapa de justesse, par le poignet qu’il relâcha d’un mouvement furtif lorsqu’il se rendit compte de qui il était en train de tenir par la main. Cette jeune femme s’appelait, Sunny quelque chose, un nom coréen d’après lui, mais rien n’est moins sur. Sunny Lee ! son nom revint furtivement à la surface de la mémoire de l’étudiant. Il l’avait déjà rencontré à plusieurs reprises lors des cours d’anglais. Lee n’était pas particulièrement brillante à ses yeux, m’enfin bon c’est le cas de tous les professeurs. N’appréciant ni ne prêtant vraiment attention à l’école et aux enseignants, Nanahara les trouvaient tous ennuyeux au possible et inutile. Enfin bon, la jeune femme n’étant qu’au début de sa carrière, au printemps de sa vie, aurait tout le temps nécessaire pour progresser. Affiner ses techniques d’enseignements, son autorité… tout ce qui fait qu’un inspecteur vous qualifie de bon professeur ou non.

Actuellement, elle n’avait rien à lui enseigné. Mis à part peut-être à marcher droit. Elle ne se priva pas le moins du monde pour l’engueuler dans les règles de l’art. Rarement Nanahara se prit une telle déculottée verbale devant témoin. Sunny pestait à tout va, à voix haute et visiblement sans se soucier des gens alentours. Shuya pu voir sur le visage des quelques personnes qu’il cherchait du regard pour essayer de trouver un réconfort à l’engueulade, qu’elles avaient l’air effrayées par tant de rage et de férocité. De toute évidence, si elle avait pu le traiter d’imbécile ou pire encore, elle ne s’en serait pas privée bien au contraire. Au bout d’un petit moment, le lycéen commença à trouver le temps long. L’apprentie pouvait le sermonner autant que possible, jamais il ne plierait l’échine devant elle. En fait, le jeune Nanahara n’accordait aucun crédit aux critiques et reproches des gens. Il n’en fait qu’à ça tête et c’est tout ce qui compte à ses yeux. Après la pluie vient le beau temps, la jeune femme cessa de pester à tout va. Mais le temps resta couvert, sa manière de le questionner n’était pas très engageante pour ainsi dire. « C’est lundi, je n’ai pas cours aujourd’hui. Alors je me balade dans la rue…. J’allais justement vers cette boutique, vous voyez ? » A quoi bon essayer de lui mentir en racontant qu’il ne pouvait pas aller en classe, puisqu’aujourd’hui un rendez-vous chez le médecin avait lieu, ou toute autre excuse en mousse d’ailleurs. Il imagina déjà sa réponse, Sunny lui dirait assez sèchement qu’il ferait mieux de rentrer chez lui et réviser ses cours, son anglais en particulier. Mais cela, n’arriverait probablement pas si Nanahara devait le faire seul, impossible pour lui de travailler, il existe toujours quelque chose pour le distraire. Enfin bref… « Et vous, vous n’êtes pas en train d’enseigner ? … Sensei».